Quand la milice vous joue des tours - Ronan

Emma était toujours à la maison, parce que pour le moment elle ne pouvait pas reprendre le travail. Elle trouvait le temps long bien qu'elle comprenait ne pas pouvoir reprendre son travail de suite. Elle était sous surveillance elle l'avait bien compris et elle reprendrait sans doute le travail quand on jugerait qu'elle le mérite vraiment.
Avec Ronan ils ne faisaient que se croiser et ne parlaient absolument pas, c'était dur et difficile pour elle, voir invivable et elle comptait bien lui dire même si une fois encore ce genre de discussion créerait des tensions et mènerait à une nouvelle dispute. Elle voulait mettre les choses au clair avec lui.

Quelle ne fut pas sa surpris quand elle entendit frapper brutalement à sa porte et qu'on lui sonna d'ouvrir sans tarder. Elle ne connaissait pas les voix mais elle connaissait bien les manières. Il s'agissait de la milice et c'est assez surpris malgré tout qu'elle se leva et ouvrit la porte. Deux hommes se tenaient devant elle et deux autres derrière ceux de devant et elle pu voir son époux parmi eux, mais il était en retrait. Qu'est ce qu'il venait faire là ? est-ce qu'il allait participer à quelque chose de brutal ? est-ce qu'il l'avait dénoncé elle aussi ? sur le coup de la surprise elle s'imagina tout et n'importe quoi, si bien qu'elle en blanche, laissant penser qu'elle avait peu être quelque chose à se reprocher.

"- On a ordre de fouiller tes quartiers !"

Emma ne savait absolument pas quoi répondre, si elle devait répondre ou pas d'ailleurs et elle se poussa pour laisser la place aux miliciens présents. Son regard croisa celui de Ronan qui semblait ne pas en mener large et qui avait l'air tout aussi perdu qu'elle. Sans vraiment s'en rendre compte elle porta sa main et commença à se ronger les ongles nerveusement.

La soirée avait commencé calmement pour Ronan qui avait surveillé l'Arche en faisant des patrouilles. Rapidement, en plein milieu de la nuit, alors qu'il se trouvait dans le quartier des Supérieurs, il avait été appelé pour un travail urgent. Il ignorait en quoi ce travail était si urgent et pourquoi c'était lui qui avait été appelé alors que d'autres devaient être disponibles. En général, s'il commençait par des patrouilles, on ne le dérangeait pas et il faisait ça toute la nuit. Une fois arrivé devant ses supérieurs, on l'avait rapidement mis au courant de la situation : des Inférieurs avaient été dénoncés ou été soupçonnés d'appartenir aux groupes de résistants. Cette histoire n'en finirait donc jamais ? La moindre chose pouvait mener à une dénonciation, le moindre doute, le moindre comportement suspect. Tous les Inférieurs étaient suspectés.

Il n'était pas fier de faire ça, il avait même honte. Il se reconnaissait de moins en moins dans chacun de ses actes. Avec l'un de ses supérieurs et deux collègues, ils avaient donc passé une bonne partie de la nuit à fouiller des appartements d'Inférieurs suspects. Trois pour être précis. Ils devaient fouiller chaque coin, chaque recoin. Ils devaient démonter absolument tout, laissant un désordre sans nom derrière eux. Alors qu'ils terminaient de fouiller le dernier appartement, on le prévint qu'avant de terminer sa nuit, il y avait un dernier logement à vérifier et fouiller. Sans dire un mot, il suivit ses collègues. Ces couloirs... Ils étaient en train de se rapprocher de chez Ronan. Autant dire qu'il s'imaginait déjà devoir fouiller un de ses proches voisins et il se sentait mal à l'aise pour cela. De mal à l'aise, il devint nerveux et se sentit mal lorsque les deux miliciens devant lui frappèrent à la porte de son appartement. Il déglutit difficilement. Etait-ce une blague ? Emma était là, il le savait. Ils ne se croisaient presque plus et ne discutaient pas. Rien n'allait et ça, ça n'allait rien arranger.

Au départ, il ne disait rien. Il laissait Emma ouvrir et entra dans l'appartement en même temps que ses collègues. Il n'osa pas affronter le regard de son épouse dans un premier temps, regard qu'il croisa simplement. Se contenta de dire oui de la tête lorsqu'on lui demanda de se mettre sur le côté. Évidemment, il n'avait le droit de toucher à rien. Il n'était là que pour regarder qu'il n'était pas à l'abri lui non plus. C'était une mise en garde, une humiliation. Rien d'autre. Il se sentait si honteux d'être habillé comme ces gens qui faisaient tant de mal aux autres, honteux d'avoir lui-même dû faire ça à d'autres. Enfin Ronan osa relever les yeux vers sa femme. Cette dernière était tellement nerveuse, on pouvait imaginer qu'elle cachait quelque chose. Ronan essayait de lui faire comprendre par un regard de se calmer, mais ce n'était pas facile. « Pourquoi vous fouillez ici ? Quelqu'un nous a dénoncé ? » Osa demander Ronan alors que ses collègues commençaient à tout retourner, jetant leurs affaires sur le sol, retournant chaque recoin. Il ressentait ce qu'il faisait ressentir aux autres. Le regard noir de son supérieur lui fit comprendre qu'il devait se taire. « Tu crois qu'on a besoin d'une dénonciation ? Après ce que vous avez fait... » Il ne termina pas, Ronan avala difficilement sa salive. Vous ? Pourquoi vous ? Savaient-ils quelque chose ? Ronan avait été innocenté officiellement alors pourquoi l'associer aux délits d'Emma. Il était terrifié. « Si tu dois en vouloir à quelqu'un, c'est à elle. » lâcha-t-il de nouveau. Son poing se serrait nerveusement. Il ne supportait pas que l'on parle de sa femme avec ce ton, cette voix, ce regard, mais il ne pouvait pas la défendre, pas devant eux. Aucun doute n'était permis. « Arthur est à l'école ? » se permit de lancer Ronan, froid, à Emma. Il ne savait pas précisément l'heure qu'il était, juste que c'était le matin et il refusait que leur fils n'assiste à tout ça. Impuissants, les deux devaient regarder leur appartement se faire saccager juste pour une erreur, une erreur qui les menait bien loin, chaque jour de plus en plus.

Difficile pour Emma d'accepter la situation, par chance leur fils n'était pas à la maison et il n'aurait pas à assister à un tel acte qui en traumatiserait plus d'un. Emma cherchait du réconfort auprès de son mari mais ce dernier fuyait son regard, alors la situation était compliquée. Adossé au mur de leur quartier elle ne pouvait rien faire d'autre qu'angoisser, se demander pourquoi ils en étaient arrivés là, pourquoi on fouillait chez eux alors qu'elle avait effectué sa peine de prison, pourquoi son mari avait laissé faire ça.

"- Oui, il est à l'école."

Mais cela ne changeait rien au fait qu'ils ne prenaient pas de pincettes et qu'ils retournaient tout dans cet appartement. Ils entrèrent même dans la chambre d'Arthur et Emma s'en approcha essayant de les empêcher d'y aller mais elle se ravisa quand l'un des milicien lui lança un regard noir avant de la pousser par l'épaule afin qu'elle reprenne sa place contre le mur et qu'elle ne les gêne pas. Elle ne pu s'empêcher malheureusement de dire.

"- C'est la chambre de notre fils, vous n'avez pas le droit."

Et de s'entendre dire

"- Tais toi un peu tu veux ! C'est souvent la chambre de l'enfant qui sert de cachette aux rebelles, ils pensent qu'on n'osera pas mais avec ce que tu as fait nous avons tous les droits. Et à ta place Ronan je dirais à ta femme de rester à sa place mais après ce qu'elle t'as fait j'ai bien peur que tu n'ai plus aucun autorité sur elle."

L'homme qui parlait regardait autant Emma avec mépris qu'il ne regardait Ronan bien dans les yeux afin que ce dernier sache ce qu'il pensait de lui et de ce couple qu'ils formaient. Une femme adultère c'est une honte pour un homme de leur rang.

"- Vous êtes dégoutant !"

Lui répondit Emma tout en osant le regarder dans les yeux. Elle avait peu être fauté puisque c'était son mensonge volontaire mais il n'avait pas le droit de lui parler comme ça et encore moins à Ronan.

"- Fais la taire Ronan où la fouille pourrait mal tourner."

C'était une sorte d'avertissement, c'est exactement ce qu'Emma compris. Si elle continuait de parler ou de se rebeller ils pourraient bien trouver des preuves de ce qu'ils cherchaient quitte à ce que tout ceci soit faut et apporté par la milice. Décidément Emma les avait en horreur et ça n'allait pas s'arranger dans ces conditions. Elle baissa les yeux et les laissa mettre à sac toute la chambre de leur fils. Elle n'aurait plus qu'à ranger ensuite espérant qu'ils n'auraient rien cassé.

Ronan ignorait ce qu’il devait faire, ignorait comment il devait réagir. Il essayait de protester, mais avec l’un de ses supérieurs et deux de ses collègues, que pouvaient-ils bien dire ou faire ? Il essayait de se rassurer en demandant à Emma si Arthur était à l’école. Il ne voulait pas que leur fils assiste à ce genre de situation. Il voulait le préserver autant que possible, mais à cet instant, il comprenait que ça n’allait pas être une tâche facile. La réponse d’Emma le rassura, autant qu’il était possible d’être rassuré dans ce genre de situation. Ronan ne répondit rien à sa femme, regardant les miliciens démonter tout son appartement, ses affaires éparpillées, jetées sur le sol.

Lorsqu’ils essayèrent d’entrer dans la chambre de leur fils, Emma voulut les en empêcher. Lorsque le milicien toucha sa femme par l’épaule pour la repousser, Ronan fit un pas en avant, mais se ravisa. Il ne pouvait rien y faire, inutile de causer plus de problèmes en agissant. Il serra les dent en entendant sa femme parler. Pourquoi ne se taisait-elle pas ? Elle allait causer plus de problèmes qu’autre chose. Ronan connaissait parfaitement les réactions des miliciens. La réponse de ces derniers agaça plus encore Ronan. Il se sentait si impuissant face à cette situation, il ne pouvait rien dire et rien faire. Il se sentait humilié et rabaissé par cette fouille et par tout ce qu’on disait sur eux. Comment ferait-il pour reprendre un service avec ces mêmes gens ensuite ? Comment pourrait-il continuer son métier tout en se sentant gêné et honteux ? On parlait sur lui, son épouse et son couple, il le savait très bien, mais il comprenait désormais qu’il n’était plus rien. Ronan posa son regard sur le milicien en train de parler. De l’autorité sur elle ? Jamais Ronan n’avait imaginé sa vie d’homme marié comme ça, jamais il n’avait eu envie d’avoir une quelconque autorité sur son épouse. Ces derniers temps, il était vrai qu’il avait tendance à donner l’impression de donner des ordres, uniquement parce qu’il n’arrivait plus à se faire comprendre autrement.

Comme simple réaction, il se contenta de baisser les yeux. Que pouvait-il dire ? Aux yeux de tous, Ronan n’était plus rien d’autre qu’un homme trompé par sa femme. Une honte pour tous les autres. Il était de plus en plus mal, plus encore lorsqu’Emma répondit. A quoi bon ? Ça ne les empêcherait pas de faire ce qu’ils avaient à faire. A la menace du milicien, lorsqu’ils entrèrent dans la chambre, Ronan s’approcha de sa femme pour l’attraper par le bras et la rapprocher de lui, l’éloignant ainsi de la chambre d’Arthur. « Arrête un peu et tais-toi Emma ! » Chuchota-t-il froidement, toujours observé par l’un des miliciens qui les surveillait. Tournant son regard vers les miliciens qui sortaient de la chambre de leur fils pour se diriger vers la chambre du couple, Ronan lança : « Vous ne trouverez rien ! Enfin, vous me connaissez, vous imaginez vraiment que je puisse faire partie de ces rebelles ? » Il n’en pouvait plus de voir son appartement saccagé, toutes leurs affaires éparpillées au sol, certaines cassées par la brutalité de leur geste. « On imaginait pas non plus que tu puisses vivre dans le même appartement qu’elle… » lança l’un d’eux tandis que les deux autres allèrent fouiller la chambre parentale. « Où veux-tu qu’elle aille ? » Lança-t-il, peu sûr de lui. Encore plus dans cette situation, il devait montrer qu’elle n’était pas là parce qu’il lui avait déjà tout pardonné. Le milicien se contentait de hausser les épaules. Où elle pouvait aller, c’était le dernier de ses problèmes à lui. « Si tu as quelque chose à avouer, tu devrais le faire avant qu'on trouve quelque chose contre toi ! » Lança l'un des miliciens à Emma. Une façon de lui mettre la pression sans doute.

Ce genre d'intrusion est vraiment humiliante, sans oublier que les miliciens ne sont ni discrets ni silencieux et que les voisins doivent tout comprendre rapidement vu le boucan qu'ils font en balançant leurs affaires un peu partout dans l'appartement. Recherchant on ne sait quoi, parce que finalement ils savent très bien tous les deux qu'ils n'ont rien à cacher si ce n'est quelques secrets qui n'ont pas de traces physiques. Et puis avoir menti sur cette grossesse ne fait pas d'elle une rebelle.
Emma voit bien qu'elle devrait se taire, mais elle ne peut pas laisser faire, c'est tout, c'est plus fort qu'elle, surtout quand il s'agit de son fils. Elle ne peut pas les laisser tout balancer, tout casser à leur guise. Il souffre déjà assez de la situation pas la peine en plus de lui casser son petit chez lui, son lieu à lui. Et s'il cachait quelque chose lui ils pourraient le trouver. Emma commence à avoir peur, c'est vrai les enfants ne font pas toujours ce qui est bien et peuvent parfois faire des choses sans penser aux conséquences. Et c'est Ronan avec sa voix qui la ramène à la réalité. Elle ne lui répond pas mais le regard qu'elle lui porte en dit long, elle a encore le droit à la parole et surtout de leur faire comprendre qu'ils n'ont pas à fouiller chez un enfant. Elle veut juste protéger son fils.

Et quand ils arrêtent vu qu'il n'y a plus rien à jeter par terre et qu'ils se dirigent vers la chambre du couple elle est soulagée. Elle se fiche presque qu'ils mettent le bazar dans leur chambre, comme si tout cela n'avait plus d'importance vu qu'ils ne sont plus vraiment un couple après tout. Ils peuvent bien tout saccager, Ronan ne dort plus avec elle depuis une éternité, bien entendu ce n'est qu'une impression puisque la réalité est toute autre.

"- Vous ne trouverez rien, je n'ai plus rien à cacher. Je ne suis qu'une mauvaise épouse pas une rebelle."

Au moins si c'était ce qu'ils voulaient entendre ils l'entendraient et tant pis pour Ronan, après tout c'était censé être la vérité. Elle était une mauvaise épouse, une mauvaise femme puisqu'ils ne cessaient de le laisser penser en mettant à sac leur appartement. Emma n'avait pas fini de payer, mais elle n'aurait pas été dérangé si elle avait été la seule à payer, là, leur fils allait aussi subir cette fouille parce qu'elle n'arriverait jamais à tout remettre en état après leur départ.

Il semblait à Ronan que les miliciens prenaient plus de plaisir encore à fouiller chez lui que dans les autres appartements. Il avait une telle rage en lui, rage impossible à faire sortir s'il ne voulait pas avoir de problèmes. Enfin, en avoir plus que maintenant, si c'était encore possible. Il essayait d'empêcher Emma de continuer. En parlant ainsi, elle risquait de leur faire avoir de graves ennuis. Alors, il l'avait attrapé par le bras pour l'éloigner de la chambre d'Arthur et lui avait demandé de se taire. Le regard de son épouse lui fit tout de suite comprendre ce qu'elle pensait. Elle n'avait nul besoin de parler.

Ronan essayait de faire comprendre à son collègue présent qu'ils ne trouveraient rien, qu'il était loyal. Il s'en fichait complètement. Dire qu'il devait travailler avec ces gens. Il ne supporterait plus le regard qu'on porterait sur lui. Un des miliciens demanda à Emma si elle avait quelque chose à cacher. Ronan se sentit tout à coup nerveux sans savoir pourquoi. Son regard se posa sur sa femme pour écouter sa réponse. En l'écoutant, il ressentit un mélange de différents sentiments. Ronan releva les yeux vers l'un des hommes présents qui s'était mis à rire. C'était si amusant de voir Emma avouer être une mauvaise épouse ? Il ne pouvait rien dire, rien de la vérité en tout cas. Il ne pouvait pas défendre Emma. « Je vous in... » Il n'eut pas le temps d'en dire plus, bousculer par son supérieur, qui ajouta : « Ne dis rien Ronan, on peut toujours trouver quelque chose... » et comme pour confirmer ses mots, il porta sa main à la poche de sa veste. Poche qui contenait certainement de fausses preuves. « On vous a à l'oeil ! On reviendra aussi souvent qu'il le faudra pour vous faire comprendre ce que vous êtes ! » Ce qu'ils étaient ? Une femme adultère, qui avait eu l'enfant d'un autre avant d'avorter ? Un homme trompé qui acceptait sa femme malgré tout ? Un homme qui avait dénoncé une Supérieur pour se sauver ? Il savait que ce dernier point était certainement tout aussi important que les soi-disantes faute d'Emma, surtout aux yeux de ce Supérieur. Ronan restait silencieux, ne disait plus rien. Ils avaient tout fouillé, il n'attendait plus que leur départ.

Emma avait vraiment du mal à accepter cette intrusion et plus les minutes passaient plus elle avait envie de hurler après la milice qui était dans leur quartier mais aussi après son mari qui ne faisait rien de particulier pour les empêcher d'agir. En même temps elle savait très bien qu'il ne pouvait rien faire mais une petite partie d'elle voulait qu'il se bouge, qu'il leur montre qu'on ne rentrait pas chez lui comme dans un moulin, qu'il faisait parti de leur groupe justement qu'ils n'avaient pas à traiter l'un des leur de cette façon. Elle remarqua aussi qu'il semblait mécontent, qu'il ne devait pas apprécié mais qu'il ne faisait rien. C'était rageant de voir qu'on les accusait mais Emma compris rapidement que ce n'était que le début, qu'ils n'allaient pas être tranquille par la suite, qu'on ne les laisserait jamais tranquille parce qu'elle avait fauté. Cette politique était vraiment une saloperie de politique de répression et franchement il fallait en avoir pour réussir à supporter ça. Même les miliciens n'étaient pas épargnés, c'était pour dire. Ronan n'en aurait jamais fini de dénoncer, on en reviendrait toujours au même.

Ils finirent par partir, laissant le couple accuser le coup. Ronan ne les suivit pas, visiblement il avait terminé son service en beauté. Emma ne lui adressa même pas la parole, elle se précipita simplement dans la chambre de son fils et commença à ramasser, ranger tout ce qu'elle pouvait. Elle ne voulait pas qu'il paie ses bêtises et qu'il se rende compte que lui aussi était la cible de la milice. Elle ne cessa pas de ramasser, comme si c'était la chose la plus importante à ses yeux. Essayant de retrouver la place de chaque objet qu'elle tenait en main, remettant les draps, rangeant et ramassant ce qu'ils avaient brisé. Elle s'arrêta devant un jouet qu'il appréciait beaucoup et qui était cassé. Tenant un morceau dans la main, s'agenouillant pour ramasser un autre bout, perdu et totalement désemparée, elle ne voyait pas comment le réparer sans qu'il ne se rend compte de ce qui venait de se passer dans son chambre.

"- Ils sont horribles ! Je les déteste pour ce qu'ils viennent de faire à Arthur."

Qu'elle dit suffisamment fort pour qu'il entende même s'il n'était pas forcément tout proche d'elle.

Les menaces des autres miliciens le mettaient hors de lui. Pourtant, il ne pouvait pas agir plus qu'il ne le faisait déjà. Il s'était fait bousculer lorsqu'il avait essayé de l'ouvrir. Au fond de lui, il savait bien que s'il osait trop en dire, ils trouveraient ce qu'ils étaient venus chercher. C'était une façon de les humilier, de leur faire comprendre qu'ils pouvaient les faire tomber s'ils le voulaient, même si pour ça, ils devaient falsifier des preuves. Les miliciens partirent enfin après les avoir mis en garde une fois encore. Ronan ne les avait pas suivi, son service étant terminé. Ils avaient gardé le meilleur pour la fin, en l'obligeant à regarder son chez lui être fouillé par ses propres collègues.

Lorsqu'ils furent seuls, Ronan s'attendait à recevoir une pluie de reproches, mais Emma ne daigna même pas lui lancer un regard. Elle se précipita dans la chambre de leur fils. Ronan, lui, fut incapable de bouger pendant plusieurs secondes, peut-être minutes même. Il regardait son appartement, saccagé, retourné. Il se mit à réagir. Arthur ne devait rien voir de ce qui s'était passé dans cet appartement. Ils avaient un peu de temps pour tout ranger. Il commença par redresser la table et les chaises pour les remettre en ordre, puis essaya de glisser le maximum de petites choses dans les tiroirs. Mais il fut rapidement sortie de ses pensées par Emma qui avait crié quelque chose. Il s'approcha de la chambre de leur fils. Emma était là, un jouet cassé de leur fils entre les mains. « Je suis désolée Emma... Je ne pouvais rien faire pour les en empêcher ! » Ils avaient beau être en colère, ne plus s'entendre, jamais il n'avait voulu que ça arrive. Il ne savait pas si ce "ils" le désignait aussi. Après tout, il avait fait la même chose dans d'autres appartements d'autres Inférieurs alors il n'était pas mieux.

Emma était en colère mais pas spécialement contre son mari, juste contre cette politique, cette milice qui soit disant faisait appliquer la loi mais qui en réalité ne faisait que mépriser les citoyens en se montrant terriblement accusateur et sans gêne. Quest ce qui leur donnait le droit de traiter les gens ainsi ? rien, absolument rien, tout le monde faisait son travail dans l'espoir qu'un jour ils pourraient enfin poser le pieds sur cette nouvelle terre et vivre une vie en plein air. Mais même ça rien ne pouvait leur garantir qu'un jour cela arriverait parce qu'à ce train là très peu de citoyens arriveraient à bon port, beaucoup auraient été sacrifié avant à cette rébellion qu'on accusait de tout et de rien. Parfois Emma se demandait si elle existait vraiment si ce n'était pas le gouvernement qui avait crée ça juste pour pouvoir s'en prendre à son peuple et en exterminer le plus possible. Dans des moments comme celui-là elle espérait qu'elle existait vraiment et qu'elle ferait payer à la milice et aux supérieurs tout les malheurs qu'ils devaient supporter à cause d'eux.

Ronan se présenta dans la chambre d'Arthur et s'excusa à sa manière. Emma leva les yeux vers lui et le regarda, se demandant s'il était complice lui aussi ou simplement victime tout comme elle.

"- Tu n'aurais pas du mettre notre nom sur la liste des suspects. Tu aurais du tout faire pour qu'on n'y soit pas."

Bien sur elle disait cela mais elle ignorait qu'il n'était pas au courant, qu'il avait été mis sur le fait accompli tout comme elle et qu'il ignorait qu'ils allaient s'en prendre à leur quartier. Ronan était une victime lui aussi, une victime d'un système qu'il cautionnait pourtant.
Elle tenait toujours fermement ce jouet entre ses mains, cherchant dans sa tête comment elle allait pouvoir expliquer à son fils qu'il était brisé et qu'il ne pourrait jamais être remplacé. Elle allait sans doute mentir encore et toujours pour trouver une excuse valable, elle l'aurait brisé en voulant ranger, quelque chose dans le genre.

Et puis d'un coup elle ajouta, comme si c'était une évidence.

"- Tu devrais aller te coucher, je vais me débrouiller pour tout ranger."

Il avait fait sa nuit de travail et comme toute personne ayant travailler il avait le droit d'aller se reposer.

Ronan était furieux, en colère, humilié. Ses propres collègues, ces gens avec qui ils avaient passé plus de dix ans de sa vie, ne lui faisaient plus confiance. Sa vie était une catastrophe. Il avait espéré, après avoir retrouvé Emma, pouvoir être de nouveau heureux, mais il s'était trompé. Il avait l'impression que plus jamais il ne pourrait l'être. Alors qu'il commençait à ranger quelques affaires éparpillées au sol, il entendit Emma crier quelque chose à propos des miliciens. Il ignorait s'il devait se sentir concernés ou non par ces quelques mots. Après tout, même si lui n'avait rien saccagé dans leur appartement, il avait fait la même chose à d'autres. Après avoir rejoint Emma dans la chambre d'Arthur, il s'excusa comme il le pouvait. Que pouvait-il bien dire ? Après tout, quoi qu'il dise, rien ne changerait ce qui venait de se passer. Sa réponse le faisait lever les yeux au ciel, en soupirant. Fallait-il, qu'en plus de tout le reste, elle l'imagine désormais complice des crimes commis envers sa propre famille ? « Comment tu peux dire ça, Emma ? Tu crois qu'ils me l'ont dit ? Tu crois que je leur ai demandé de faire ça ? A leurs yeux, je ne suis plus rien... Ils me l'ont bien montré aujourd'hui en m'humiliant comme ils l'ont fait ! » Parce qu'il s'était senti humilié. Lui, un des leurs, condamné à regarder sans pouvoir agir, les voir détruire ses affaires. Les miliciens étaient des Inférieurs respectés en général, un minimum tout du moins, mais aujourd'hui ce n'était plus le cas de Ronan.

Ronan observait sa femme, ce qu'elle tenait dans les mains. Elle devait certainement le maudire. Ce jouet, Arthur l'aimait tant. Des objets personnels, ils en avaient tellement peu. Des choses récupérées de leurs parents lorsqu'ils étaient arrivés sur l'Arche, des choses achetées après des mois de travail... Chaque objet était précieux et avait une certaine importance. « Je ne veux pas te laisser faire ça toute seule.. » Il était fatigué, oui. Mais il ne pouvait pas dormir et laisser Emma affronter cette situation toute seule. Il s'approcha d'elle, se mettant à ses côtés. « On va trouver un moyen de le réparer Emma. » promettait-il sans aucune certitude pourtant. « J'ai fait subir ça à d'autres Inférieurs cette nuit, Emma. J'y ai participé, j'ai aidé, j'ai fouillé, j'ai saccagé des appartements moi-aussi... » se confia-t-il en baissant les yeux, ne pouvant affronter ce qu'il lirait dans le regard de son épouse. Il avait besoin de confesser cette horreur, même si Emma n'était peut-être plus la bonne personne pour l'entendre.

Emma ne savait plus ce qu'elle devait croire ou non, alors forcément imaginer son mari ajouter leur quartier à la liste des quartiers à fouillé pouvait paraitre totalement normal et logique même vu qu'il dénonçait tout le monde pour se faire bien voir. Du moins, c'est un peu ce qu'elle pensait parfois quand elle se mettait à le détester pour ce qu'il était devenu. Bien entendu elle ne pouvait pas le détester totalement mais elle était en colère et il fallait bien qu'elle passe sa colère sur quelqu'un et vu qu'elle n'avait pas réussit à le faire sur les miliciens présents et bien c'est Ronan qui prenait d'une certaine manière.

"- Je ne crois plus rien Ronan, je ne sais plus ce que je dois penser avec toi. Et moi aussi ils m'ont humilié, il y ont pris du plaisir même."

Il ne l'avait pas défendu mais Emma comprenait qu'il n'avait pas pu juste qu'elle lui en voulait malgré tout. Il aurait du se dresser contre eux, leur montrer qui était le chef, qu'il était chez lui et que ce quartier était privé, qu'ils n'avaient rien à y faire milice ou pas, dénonciation ou pas, adultère ou non.

Il avait fini par se placer à côté d'elle et l'aidait à ramasser, mais il avait surtout dit qu'ils allaient trouver un moyen de réparer ce jouet qu'Arthur aimait tant. Difficile de le croire, on n'était plus sur terre et il n'y avait plus de bricoleur, plus assez de fourniture pour certaines choses et surtout ça coutait toujours énormément et pour l'instant plus personne ne leur ferait de cadeau.

"- J'en doute Ronan, il faut se rendre à l'évidence, il est fichu et Arthur ne comprendra jamais pourquoi on lui a détruit."

Bien entendu elle avait déjà un scénario dans sa tête, une maladresse de sa part, mais est-ce qu'il la croirait ? parce qu'à force de dire des mensonges on fini par s'y perdre soit même.

"- Au moins maintenant tu comprends ce qu'ils ressentent."

Ce n'était pas une critique, juste une constatation, au moins maintenant il comprenait ce que les autres pouvaient ressentir, pourquoi la milice était tant crainte.
La chambre d'Arthur fut ramasser assez rapidement, excepté ce jouet cassé qu'Emma finit par déposer sur le bureau, espérant que peu être Ronan avait raison et qu'il pourrait le réparer. Elle quitta la chambre d'Arthur pour se rendre dans la leur, rangeant rapidement le contenu des tiroirs, replaçant les cintres et mettant tous les vêtements en vrac dans l'armoire. Elle grimpa sur le lit pour tenter de remettre le matelas qu'ils avaient fait voler de l'autre côté de la pièce, n'espérant même pas un peu d'aide de Ronan.

C'était ainsi qu'elle le voyait désormais. Un traître. Un lâche. Avant ils étaient si proches, unis, prêts à tout l'un pour l'autre. La séparation, la distance et les mensonges les avaient détruit. Ils s'étaient éloignés sans s'en rendre compte. Et le retour d'Emma, plutôt qu'arranger les choses les avait empirer. Ils ne se parlaient même plus, ne restaient plus dans la même pièce. Ronan avait parfaitement conscience d'y être pour beaucoup, mais il avait voulu cet éloignement pour elle, pour son bien, pensant qu'elle le désirait. En réalité, ils ne se comprenaient juste plus. Là le simple fait qu'elle ait pu imaginer, ne serait-ce qu'une seconde, qu'il y était pour quelque chose, qu'il avait directement participé à tout ça... Il savait qu'elle avait été humiliée. Il ne voulait pas en parler. Il n'avait pas pu la défendre comme il aurait voulu, comme il aurait dû le faire. Il ne répondit rien, comprenant que ce n'était pas le moment.

Il avait préféré, à la place, se rapprocher de sa femme qui tenait le jouet cassé de leur fils entre les mains. Bêtement, il lui promit qu'ils pourraient le réparer. Ce n'était qu'une petite promesse de plus qu'il ne tiendrait pas. Pourtant, une part de lui se persuadait qu'il trouverait un moyen. Ce n'était peut-être rien d'autre qu'un jouet, mais c'était précieux pour eux. Il voulait se racheter, même si ce n'était que pour cette petite chose. A sa réponse, il ne répondit rien non plus. Jamais il n'avait été si silencieux, même s'il n'avait jamais été quelqu'un qui aimait parler. Il se sentait si coupable, si responsable de lui avoir imposé ça qu'il n'osait plus rien dire. Plus rien jusqu'à ce qu'il lâche son aveu, ce besoin de se confier et d'être réconforté. « Je n'ai jamais pris aucun plaisir à faire ça... » Tenta-t-il de se justifier. Il avait toujours compris, en partie du moins, ce que les gens ressentaient. Pourtant, il ne cherchait pas à se justifier davantage, comprenant qu'il n'aurait rien d'autre de son épouse et surtout pas du réconfort, après tout, il ne le méritait certainement pas.

C'est en silence que le couple rangea le reste de la chambre. Au bout d'un moment, Ronan retourna dans la pièce principale. Heureusement que leur appartement était minuscule, sans quoi il y aurait eu bien plus de dégâts encore. En ramassant, il tomba sur une photo dont la vitre était complètement brisée. Ils avaient déjà si peu de choses. Tout n'était pas encore tout à fait en ordre, mais Ronan alla rejoindre son épouse dans leur chambre. Elle était en train d'essayer de remettre le matelas dans leur lit. « Je vais t'aider... » souffla-t-il en s'approchant. « Emma... Tu ne vas pas m'en vouloir pour ce qui vient de se passer ? » Ca ne devrait pas l'inquiéter plus que ça, après tout, avant ça, ils étaient déjà en froid.

Ronan était devenu égoïste, c'est ce que pensait à présent Emma quand elle le regardait. Il ne pensait qu'à lui, alors qu'il ne cessait de dire qu'il faisait tout cela pour eux, pour leur famille et pour les protéger. En réalité, Emma le savait bien c'était pour se protéger lui et elle lui en voulait de ne pas vouloir se l'avouer. Elle ne lui demandait pas de lui avouer à elle mais d'arrêter de se mentir parce qu'il l'était devenu c'était aussi simple que ça. Quand il lui fit cet aveux elle répondit simplement comme si c'était une évidence, sans rien ajouter d'autre, sur un ton neutre.

"- J'espère bien."

Oui, elle espérait bien qu'il n'avait jamais pris aucun plaisir à faire du mal aux autres, à entrer dans leur vie privée et à y mettre le bazar comme les autres venaient de faire chez eux. Elle espérait bien qu'il ne prenait pas plaisir à dénoncer les autres, parce que sinon cela voulait dire qu'il était devenu encore pire que ce qu'elle pouvait imaginer. Et pourtant, malgré tout ce qu'elle pensait, tout ce qu'elle imaginait elle ne pouvait pas se résigner à cesser de l'aimer. Elle lui en voulait oui mais elle l'aimait toujours, espérant qu'à un moment il finirait par se reprendre, se rendre compte qu'il était en train de creuser un fossé entre eux et qu'il ferait le nécessaire pour le combler et revenir vers elle, redevenir l'homme qu'elle l'aimait et qu'elle aime encore.

Elle se rendit dans la chambre et c'est là qu'elle l'entendit lui dire qu'il allait l'aider. Elle pouvait se débrouiller seule mais un peu d'aide pour remettre le matelas n'était pas de refus, après tout c'était lourd quand même et pas forcément simple de bouger ça toute seule. Et à la question qu'il lui posa alors qu'ils étaient en plein effort pour remettre le matelas elle répondit simplement.

"- Je ne sais pas, je ne sais plus..."

Et puis elle prit une longue inspiration alors qu'elle tirait sur le matelas que son mari soulevait et poussait. Ils réussirent enfin à le remettre et Emma se laissa tomber dessus doucement. Reprenant son souffle et fatiguée d'avoir à tout ranger et de l'avoir fait rapidement comme s'il fallait cacher toute trace d'intrusion de la milice. C'était ça en réalité, il fallait tout cacher et pas seulement pour Arthur mais aussi pour eux, pour les voisins, pour leur réputation.

"- Tu peux t'allonger sur le lit pendant que je terminerai de ranger le salon."

Après tout il avait fait sa part et il avait quand même le droit de se reposer, et la chambre était le meilleur endroit pour ça. Emma pourrait vaquer à ses occupations et essayer de tout ranger correctement avant le retour d'Arthur et lui pourrait essayer de dormir quelques heures.
Elle n'avait pas changé de place, elle était toujours adossé au lit, pieds au sol, prête à se relever mais n'en trouvait pas le courage pour l'instant.

Pourquoi ne se comprenaient-ils plus ? Ronan savait qu'il avait changé, qu'il n'était plus le même homme. Il était forcé chaque jour de faire des actes dont il n’était pas fière du tout, dont il avait peur et qui le faisait culpabiliser. La plupart de ces actes était pour protéger sa femme et son fils. Sa famille. La seule chose qui comptait à ses yeux. Il avait essayé de se confier à sa femme, de retrouver cette complicité d'autrefois, mais elle ne répondait pas positivement. Elle se contentait d'être neutre et ne cherchait pas à le rassurer. Il comprit qu'il n'obtiendrait pas de soutien. C'était une preuve encore de leur éloignement. Avant, jamais l'un n'aurait laissé l'autre dans cet état, avec cette culpabilité et ce mal être.

Mais il ne disait plus rien, se contentant de ranger en silence. Au bout d'un certain temps, il se dirigea vers la chambre pour l'aider. Elle était en train d'essayer de remettre le matelas, mais seule, la tâche semblait compliquée. C'était lourd et encombrant, difficile à manier pour une personne seule. Alors il s'approcha pour soulever et pousser ce dernier. Il osa alors lui demander si elle comptait lui en vouloir pour ce qui venait de se passer. Ce Ronan était bien différent de celui qui était là pour la sortie d'Emma. Ce Ronan était honteux et épuisé par toute cette situation. Il n'y arrivait plus. Il ne pouvait plus sortir la tête de l'eau. Il se détestait tellement, ne supportait plus ce qu'il devait faire et était bloqué dans cette vie qu'il ne supportait plus. Il était aussi terriblement en colère par ce qu'il venait de se passer, il en voulait encore à Emma pour leur dernière dispute. Mais tout ça passait après pour le moment, tant il avait besoin de retrouver une vie normale quelques instants. Emma avait été franche. Ronan n'ajouta rien, comprenant bien qu'elle avait toutes les raisons de lui en vouloir. A sa demande, il se contenta de s'asseoir sur le lit, dos à elle. Elle avait raison. Il était plus qu'épuisé après sa nuit de travail. Il avait besoin de repos. Pourtant, il se sentait mal à l'idée de la laisser tout finir toute seule. Il se retourna pour la voir et posa l'une de ses mains sur celle d'Emma. Il ignorait si elle accepterait ce contact ou non, mais il tentait. « Emma, je te jure que si j'avais pu t'éviter cette épreuve, je l'aurais fait... » il voulait qu'elle le comprenne. Il ne supportait pas l'idée qu'elle le considère comme en partie responsable. « Tu imagines vraiment que je suis capable de tout ça ? De dénoncer nos voisins et amis ? Notre famille ? » Il l'avait fait, à plusieurs reprises, il avait dénoncé ou arrêté des voisins et amis, mais en tant que milicien, on ne lui laissait pas le choix.

Emma se montrait franche avec son époux mais elle n'allait pas plus loin, ne voulant plus se disputer avec elle. Elle avait assez supporté leurs disputes et en ce moment elle avait juste besoin de calme et de temps pour accepter certaines choses. Bien entendu elle aurait voulu son soutien mais elle avait compris depuis son retour qu'elle ne l'aurait plus, que tout ceci était terminé et qu'un jour il faudrait qu'ils fassent un choix. Leur couple était en train de mourir et avec cela leur famille, Emma était terrifiée à l'idée de perdre son époux, même si elle ne pouvait plus vraiment compter sur lui en ce moment elle avait besoin de lui et Arthur encore plus. Comment elle fera s'ils venaient à se séparer ? est-ce qu'ils pourraient seulement le faire sans qu'Arthur n'en paie le prix ? Elle ne savait plus quoi penser de lui, et encore moins si elle devait lui en vouloir ou pas et elle voulait qu'il le sache alors c'est ce qu'elle lui dit, sans insister plus que ça.

Ronan finit par accepter sa proposition et s'installer dos à elle, c'était déjà un début il finirait bien par s'allonger. Pendant ce temps là Emma resta là à se demander comment tout ceci allait se terminer. Elle aurait du s'activer un peu plus et sortir de cette pièce pour terminer de ranger mais elle avait besoin d'une pause et cette pièce était une pièce particulière pour leur couple, c'était là qu'ils dormaient avant qu'elle ne revienne dans leur vie, qu'elle ne sorte de prison. Ronan y avait dormit un nombre incalculable de nuit sans elle et depuis son retour c'était à son tour. Est-ce qu'il voulait qu'elle y dorme autant de nuit que lui l'avait fait ? c'était peu être ça, il voulait lui faire vivre ce qu'il avait vécu alors qu'elle était en prison. Non, ce n'était pas possible il ne pouvait pas vouloir ça pour elle. Quand il posa sa main sur elle et qu'il lui parla à nouveau, Emma ne le repoussa pas, c'était comme dans un rêve en fait. Sans doute qu'elle somnolait et qu'elle n'avait pas vraiment l'impression qu'il la touchait, c'était comme un nuage, c'était flou.

"- Je ne sais pas Ronan.. tu l'as fait avec Fantine....."

Difficile de dire le contraire parce que même si c'était pour une raison particulière il l'avait fait, il avait dénoncé une amie, une grande amie alors il était bien capable de le faire puisqu'il l'avait déjà fait.

Ronan était à bout de force, épuisé. Il l'était autant physiquement que moralement. Il sentait sa vie lui échapper depuis si longtemps. Il aimerait, à cet instant, fermer les yeux, s'endormir et se réveiller dans un monde différent. Un monde où il serait toujours heureux aux côtés de sa femme et de son fils. Il ne savait plus ce qu'il devait faire pour la récupérer. Lorsqu'il essayait de lui parler, de justifier ses actes ou ses ordres, ils s'engueulaient. Las de cette situation, Ronan s'était assis. Il ne voulait pas la laisser tout finir toute seule, mais après autant d'heures de travail, il avait, en effet, besoin de dormir quelques heures.

Il était en colère, il pensait toujours qu'il fallait prendre toutes les précautions devant Arthur ou à l'extérieur, mais il voulait aussi retrouver son épouse. Il avait changé, il avait peur qu'elle ne l'aime plus autant qu'elle le disait. Ce qui venait de se passer avait fini de l'achever, de le détruire. Il n'avait plus sa place sur ce vaisseau depuis bien longtemps, mais il en avait désormais la preuve absolue. Il avait besoin de son épouse, besoin d'être rassuré, besoin de se sentir en sécurité auprès de quelqu'un. Il osa alors un geste tendre vers elle en posant sa main sur la sienne. Peut-être que les tensions ne s’apaiseraient que quelques minutes, peut-être qu'à son réveil les disputes recommenceront, mais ce simple moment de répits lui suffisait. Il en avait plus que besoin. Il avait aussi besoin de réconforter sa femme. Elle avait été blessée autant que lui par la milice. Elle avait été jugée, traitée comme une moins que rien et elle n'avait pas pu compter sur le soutien de Ronan. Elle avait vu son appartement saccagé. Elle avait passé des semaines en prison. Et elle n'avait pas pu compter sur l'amour de son mari en sortant. Autant dire que pour elle non plus, ça ne devait pas aller au mieux.

Il fut rassuré lorsqu'Emma ne retira pas sa main, moins lorsqu'elle prononça ces quelques mots. « Je voulais nous sauver la vie Emma. Je ne pouvais pas supporter l'idée de savoir Arthur seul, orphelin... Tu aurais préféré que je fasse quoi ? » Il retira sa main. Il se sentait déjà suffisamment coupable, mais sur le coup, il ne voyait que ça pour se sauver la vie ainsi que celle de sa femme. Et surtout, il savait que Fantine ne risquait rien de plus qu'un simple avertissement. « Je sais ce que je suis devenu, je sais le monstre que tu dois supporter... » Le monstre. Parce que c'était bien ce qu'il était devenu, ce monstre pleins de culpabilités et de peurs. Il se haïssait pour ça et ne supportait pas qu'Emma ne le juge pour ça. Il pouvait justifier chacun de ses actes : sa loyauté envers l'Arche, sa loyauté envers sa famille, sa peur de mourir et de les laisser seuls, sa peur de voir Emma souffrir, sa peur de désobéir au Gouvernement. Mais même s'il pouvait les justifier, ça ne les excusait en rien. Il le savait et le comprenait.

Emma ne savait plus quoi penser, de la situation, de son époux, de son mariage, de sa vie en général. Elle ne savait même pas si elle pourrait retravailler un jour avec tout ce qu'on pensait d'elle est-ce qu'elle y parviendrait seulement ? elle le pourrait si elle se sentait encouragé mais rien n'était moins sur à présent. Elle essayait de ne pas créer de nouvelle dispute, elle voulait juste un peu de répit après ce qui venait de leur tomber dessus. L'appartement était encore loin d'être rangé comme avant et Arthur se rendrait rapidement compte que quelque chose c'était passé s'il revenait dans les minutes qui arrivent, mais heureusement il n'allait pas rentrer maintenant. Emma était lasse de cette situation de devoir se battre sans arrêt contre son mari et sa culpabilité, il ressentait un besoin irrépressible de devoir toujours se justifier et s'en était lassant.
Bien sur, comme elle s'y attendait la main de Ronan quitta la sienne aussitôt qu'elle lui répondit et cela l'attrista. Elle ne l'avait aucune accusé ni même jugé elle n'avait fait que répondre à sa question sans agressivité et pourtant il s'éloignait à nouveau, mettait de la distance entre eux. Lui qui ne l'avait pas touché depuis des mois, lui avec qui elle n'avait pas dormi depuis des mois. Elle soupira à sa réponse, toujours la même et répondit simplement.

"- Je sais Ronan, je sais pourquoi tu l'as fait..."

Cela ne veut pas dire qu'elle le cautionne, mais qu'elle ne veut plus l'entendre se justifier, lui répéter toujours la même chose, se sentait coupable à chaque fois. Elle n'en peut plus de tout ces mots.
A l'écoute de ce qu'il ajouta Emma se releva pour glisser une jambe sur le lit afin de rapprocher de lui, agenouillé à demi elle se plaça dans le dos de Ronan, posant l'une de ses main sur son épaule et se colla à son dos avant de venir poser sa tête contre celle de Ronan. Et tant pis s'il ne se retourne jamais, au moins elle aura fait un geste, celui d'une épouse envers son mari. Puis elle lui dit.

"- Tu n'es pas un monstre Ronan, pas à mes yeux en tout cas."

Peu être pour les autres il en était devenu un mais pour Emma il restait l'homme qu'elle aimait, celui dont elle était tombé amoureuse, cet homme plein de compassion, plein de tendresse. C'est sur qu'il avait disparu depuis quelques temps, laissant place à un homme froid rempli de culpabilité et qui c'était perdu tout simplement. Et en se perdant il avait perdu son épouse par la même occasion, mais il n'était pas un monstre.

Elle aurait aimé le retrouver, retrouver son époux mais elle se doutait bien que rien ne pourrait le changer, il était parti trop loin pour lui revenir à présent. Donc elle c'était fait une raison et espérait simplement qu'il n'allait pas la rejeter, s'éloigner d'elle à nouveau, parce que ça signifierait beaucoup pour elle. Elle qui n'avait pas été touché par un homme depuis tellement longtemps.

Depuis le retour d'Emma, c'était la première fois que les deux réussissaient à discuter sans hausser la voix. Bien sûr, ça ne durait pas depuis longtemps, mais c'était suffisant pour rassurer Ronan. Des disputes, il y en aurait d'autres. Ronan avait encore trop de rage, trop de haine, trop de colère, trop de culpabilités, trop de tout en lui. Il ne pouvait pas redevenir l'homme qu'il était autrefois en un claquement de doigt. Il se sentait si faible, si mal, si perdu après la visite de la milice que ça avait pris le pas sur tout le reste. Il avait même osé un geste vers elle, en posant sa main sur elle. Ce n'était pas grand chose, mais pour lui c'était un réel pas en avant. Il croyait réellement l'avoir perdu pour toujours, mais ce geste et ces quelques mots lui redonnaient un peu d'espoir au fond de lui. De l'espoir qu'un jour tout pourrait s'arranger. Il leur fallait du temps pour réapprendre à se connaître et vivre ensemble. Il leur fallait du temps pour gérer cette nouvelle situation et cette nouvelle vie, partagée entre leur amour réel, du moins il l'espérait, et ce qu'ils devaient montrer au reste de l'Arche. Il leur fallait juste du temps. De la patience.

Encore une fois, Ronan s'était justifié, excusé. Il aurait aimé ne pas dénoncer Fantine. C'était une femme qu'il aimait beaucoup, mais entre elle et sa famille, le choix avait été rapide. Bien sûr qu'il n'en était pas fier, ça le bouffait, mais ce choix, il le referait sans hésiter. Il avait passé énormément de temps à se justifier auprès d'Emma comme à la recherche d'un pardon sincère. Il se sentait jugé, épié par tous. Il se savait menacé et en danger. Trop pour un seul homme. Ronan retira alors sa main de celle de sa femme. Il n'y avait aucune colère dans sa voix. Cet homme-là avait laissé place à l'ancien Ronan, pour quelques heures du moins. La fatigue aidait certainement. Il n'avait plus la force, ni le courage. Mais le soupire de sa femme en disait long. Elle était fatiguée de l'écouter. Pour elle, il ne s'agissait sans doute que de se plaindre et rien d'autre. Mais au fond, pour Ronan, ce besoin de se répéter, c'était tellement plus. Il avait besoin d'être pardonné et compris. Ces actes, il ne les assumait pas et vivre avec n'était pas simple. La question était presque sincère. Qu'aurait-il pu faire d'autre ? Il attendait presque une véritable réponse. Il ne répondit pas de suite, laissant Emma s'approcher de lui. Il sentit sa main sur son épaule, sa tête contre sa tête et son corps contre son dos. Un frisson l'avait parcouru. Ce contact lui avait tellement manqué. Ce contact lui faisait tant de bien. Il se sentait en sécurité, il se sentait mieux, rassuré. Sa réponse le libéra d'un autre poids, même s'il avait peur que ces mots ne soient pas vrais, juste là pour le rassurer. « merci Emma. » Pour tout. Il profita de ce contact avant de se décaler une seconde pour pouvoir se retourner vers elle, s'asseyant complètement sur le lit, face à elle. Il posa l'une de ses mains sur sa joue, ne la quittant plus des yeux, la voyant comme il ne l'avait pas vu depuis longtemps. Il avait presque oublié à quel point il aimait cette femme et être près d'elle. Il l'embrassa. Il ne l'avait pas fait depuis tellement longtemps. Il avait l'impression de la retrouver. De retrouver la femme qu'il aimait. Pour l'instant du moins. « Je vais dormir un peu... » souffla-t-il, épuisé, en lui caressant toujours la joue. « reste un peu avec moi... » proposa-t-il. Il rêvait tellement de dormir en la tenant dans ses bras comme autrefois. Et il savait que ce moment ne durerait pas toujours, que d'ici quelques heures ils devraient reprendre leur nouvelle vie, même devant leur fils, pour ne pas l'obliger à être complice de leur mensonge.

Difficile pour Emma de se montrer rassurante avec lui, tout simplement parce qu'elle n'était pas rassuré par son comportement et tout ce qui avait changé en lui. Elle l'aimait toujours autant mais il lui manquait terriblement son Ronan, celui qu'elle avait épousé et dont elle était tombée amoureuse. Pas de sa faute si elle n'était pas capable de le rassurer comme il le voulait, elle aussi avait besoin d'être rassurée. Elle avait besoin de savoir qu'il l'aimait toujours et qu'il la désirait malgré toute cette comédie qu'il avait mise en place et qui les avait éloigné l'un de l'autre. Elle l'aimait et ignorait comment elle pourrait vivre loin de lui si jamais leur couple venait à se séparer. Elle voulait se battre, mais se battre contre un mur c'est un combat perdu d'avance et elle en avait assez de se battre contre lui alors qu'elle devrait se battre à ses côtés. Ronan ne la comprenait pas et elle n'arrivait plus à le comprendre non plus. Seulement là elle avait baissé les armes et elle faisait un geste vers lui vu qu'il c'était déjà éloigné d'elle. Elle n'en pouvait plus de vivre comme ça, si loin de lui alors qu'ils vivaient sous le même toit.

Quand il la remercia de ce qu'elle venait de lui dire, elle ne savait déjà plus ce qu'elle avait dit. Ah si peu être qu'il n'était pas ce qu'il pensait être à ses yeux, oui ça devait être ça. Ronan était incompris mais il était loin d'être un monstre. Un monstre fait du mal aux autres et laisse des traces lui faisait du mal autour de lui oui mais les traces n'étaient pas non plus indélébiles, du moins aux yeux d'Emma. Elle n'ajouta rien parce qu'elle n'avait rien à rajouter, c'était simplement la vérité.

Et quand il se retourna elle ne baissa pas le regard, se contentant de le regarder silencieuse. Pas la peine d'en rajouter encore, de rallumer le feu de la dispute, elle n'en avait plus la force. Et quand il posa sa main sur sa joue lentement elle ferma les yeux pour mieux profiter encore de ce moment avant de les ouvrir et de le regarder à son tour. Elle aurait aimé fermer les yeux mais il pourrait disparaitre si elle le faisait alors autant soutenir son regard. Puis il l'embrassa et Emma regretta que ce moment ne dure pas plus longtemps. Ce baiser était doux, tendre mais aussi détaché, et c'était dommage, elle aurait aimé quelque chose de plus, mais elle s'en contenterait malgré sa déception. Il voulait dormir qu'il lui dit, chose qu'elle pouvait comprendre puisqu'elle l'avait encouragé à le faire.
Puis il lui demanda de rester un peu avec lui alors toujours en silence elle s'allongea à ses côté tout en gardant les yeux ouverts. Si c'était tout ce qu'elle pouvait avoir de lui alors elle s'en contenterait. Après tout c'était toujours plus agréable qu'une énième dispute. Après quelques longues secondes de silence elle lui murmura à demi voix "- je t'aime" parce qu'elle avait besoin de le dire, parce que c'était sincère et parce qu'elle le pensait réellement. Elle l'aimait toujours elle et si ce n'était plus son cas à lui et bien tant pis, elle en pleurerait bien sur mais plus tard quand il serait endormi.

Il se sentait si monstrueux. Il en voulait aux miliciens d'être venus fouiller chez lui. Pourtant il avait fait exactement la même chose avec d'autres Inférieurs cette nuit. Il avait fouillé chez eux, se fichant de leurs affaires et de leur intimité, il avait jeté au sol tout ce qui représentait une vie, peut-être même avait-il lui aussi détruit un objet particulièrement important ? Bien sûr, il n'avait jamais pris aucun plaisir à faire ça, il le faisait parce qu'on lui demandait, parce que c'était son métier. Il avait dénoncé Fantine parce qu'il s'était senti pris au piège et avait jugé ne pas avoir d'autres choix. Il avait arrêté son meilleur ami parce que tout le monde savait ce qu'il avait fait et le défendre n'aurait rien changé à la situation, Ronan aurait juste été puni avec lui. Malgré tout, même s'il pouvait justifier chacun de ses actes, il se sentait monstrueux. Monstrueux d'agir ainsi. Monstrueux de faire souffrir sa femme. Il changeait. Beaucoup. Il en était malheureux lui-aussi, mais n'était pas celui à plaindre. Son épouse devait vivre avec cet homme, cet homme qu'elle n'avait pas épousé. Ce n'était pas ce Ronan qu'elle avait épousé. Et il comprenait qu'elle n'en puisse plus. A ces quelques mots pourtant, il fut rassuré. Il la remercia même. Peut-être n'était-ce pas sincère, peut-être n'était-ce que pour le faire taire ou le rassurer sans le penser, mais peu importe. Peu importait pour le moment, il avait besoin de se sentir mieux, ne serait-ce que quelques minutes pour pouvoir dormir aussi bien que possible.

Emma était venue se coller à lui. Ce contact lui faisait comprendre à quel point il tenait à sa femme, à quel point il devait changer pour ne pas la perdre. Ce mensonge les avait éloigné plus encore qu'auparavant, maintenant il devait trouver le moyen de se retrouver et de s'aimer loin des autres puisqu'ils ne pouvaient plus le montrer. Ils étaient obligés de mentir à leur propre fils. Il n'en était pas fier. Il se retourna vers elle, ne la quittant plus des yeux. Il vint même toucher la joue de sa femme. Il profitait de ce contact, de cette chaleur qui s'en dégageait. Il se sentait si bien, oubliant presque ses problèmes. Il ne profitait que de l'instant et il l'embrassa. Ils ne s'étaient pas embrassés depuis le retour de sa femme. Ce fut un baiser tendre, mais bref. Ronan ne pouvait donner plus pour l'instant. Il y avait encore tellement de colère en lui malgré le calme de la situation. Malgré tout, il sentait comme de la déception ou peut-être était-ce la fatigue qui lui faisait penser n'importe quoi ? Toujours en lui caressant la joue, Ronan demanda à sa femme de rester près de lui pendant qu'il s'endormait. Il n'avait pas dormi dans les bras de son épouse depuis tellement longtemps. Et après ce qui c'était passé, il pensait ne plus pouvoir le faire avant longtemps. Alors peut-être qu'après tout recommencerait, mais il voulait profiter tant qu'il le pouvait. Il avait fini par suivre son épouse dans ses mouvements pour s'allonger en même temps qu'elle, enroulant ses bras autour d'elle pour la garder contre lui. Le sommeil le trouva rapidement. Déjà à moitié endormi, il entendit malgré tout son épouse parler : « Je t'aime aussi Emma. » chuchota-t-il à son tour. Même s'il ne le montrait pas, même s'il n'était plus quelqu'un de bien, une chose avait toujours été et sera toujours vraie : il l'aimait. Et il espérait bien que de son côté, elle l'aimerait toujours malgré celui qu'il devenait. Emma avait raison, il devait être plus que fatigué puisqu'il ne mit que quelques minutes avant de s'endormir, bien comme il ne l'avait pas été depuis bien longtemps maintenant.

Emma avait accepté de s'allonger un peu avec lui mais elle gardait les yeux ouverts pour éviter de s'endormir à son tour, impossible pour elle de se laisser aller puisqu'il fallait encore tout ranger correctement avant le retour de leur fils puisqu'elle ne voulait pas qu'il voit ce qui c'était passé dans cet appartement.
Elle eut un léger sourire quand il lui dit qu'il l'aimait en réponse à ce qu'elle venait de lui dire. C'était plaisant à entendre malgré qu'elle aurait aimé qu'il lui montre au lieu de lui dire. Elle aurait tellement voulu qu'il l'embrasse à nouveau, qu'il caresse sa peau comme il savait si bien le faire, mais c'était impossible, elle l'avait bien compris. Elle ignorait si un jour leur couple redeviendrait celui qu'il était avant toute cette histoire mais ce qui était sur c'est que Ronan lui manquait terriblement. Et si cela n'avait tenu qu'à elle, elle l'aurait tenu éveiller en l'embrassant à son tour afin qu'il lui réponde et qu'ils se retrouvent.

Pourtant elle n'avait rien fait, le laissant s'endormir tranquillement tout en restant auprès de lui, faisant en sorte de ne pas s'endormir à son tour. Pourtant, elle manqua de le faire, s'en rendant compte d'un léger sursaut. Elle se força à garder les yeux ouverts, observant les traits de son époux qui semblait apaisé, c'était étrange. Et puis après de longues minutes à le regarder elle finit par bouger doucement afin de se défaire de lui et de quitter le lit puis la chambre. Il fallait ranger, elle devait le faire, elle n'avait pas le choix.

Alors elle referma la porte derrière elle et se mit à ranger, essayant de tout remettre exactement comme c'était. Et tout en faisant cela elle se mit à penser, se demandant comment Ronan avait pu en arriver là, comment ils avaient pu en arriver là, parce qu'il n'était pas le seul coupable dans l'histoire. Ronan changeait mais sans doute qu'elle aussi après tout, il n'y avait pas de raison pour qu'il soit le seul à changer.

Ronan s'était endormi rapidement après avoir échangé un je t'aime avec sa femme. Il n'avait pas conscience d'être si fatigué, pourtant il l'était. La fatigue s'était accumulée, les émotions de la matinée avaient été exténuantes. Et s'il trouva le sommeil si rapidement, s'il se sentait si bien, c'était certainement parce qu'il tenait son épouse dans ses bras. Il ne l'avait pas fait depuis des mois. Elle lui avait manqué. Lorsqu'elle était là, près de lui, il se sentait en sécurité, il se sentait bien et son sommeil, contrairement aux autres jours, ne fut pas tellement agité, les cauchemars avaient même eu du mal à le trouver. Il dormait si bien qu'il ne sentit même pas sa femme se dégager de ses bras.

Il ouvrit les yeux quelques heures plus tard. Il se sentait encore terriblement fatigué, il ignorait combien de temps il avait dormi, mais certainement pas assez. Son premier réflexe fut de regarder à ses côtés, mais Emma n'était plus là. Pendant un instant, encore un peu perdu dans le sommeil, il se demanda même s'il n'avait pas rêvé. Il prit quelques minutes pour se réveiller tranquillement, repensant à tout ce qui venait de se passer. Il avait l'impression de devoir revenir à la réalité. Il finit par se lever, attrapant des vêtements au passage. Il n'avait pas pris le temps de se changer avant de dormir et il portait toujours sa tenue de milicien. En sortant de la chambre, il aperçut Emma, à qui il n'avait pas dit un mot, juste un simple sourire après s'être assurée qu'Arthur n'était pas dans le coin. Sans perdre une seconde, il s'était dirigé vers la salle de bain.

Une vingtaine de minutes plus tard, il revint dans la pièce principale où Emma était toujours. « Arthur n'est pas rentré ? » Il n'avait réellement aucune idée de l'heure et n'avait pas pris le temps de regarder. « Personne n'est venu ? » Il craignait l'idée que des miliciens reviennent à tout instant pour les arrêter, les accuser d'appartenir à la résistance ou simplement pour leur mettre la pression encore et encore. Il se disait que si quelqu'un était venu, il l'aurait certainement entendu, mais il avait besoin de poser la question. Il craignait aussi et surtout ses voisins qui avaient pu entendre le vacarme causée par la fouille ou les représailles de ceux chez qui il avait fouillé.

Emma avait tout rangé dans la pièce principale, elle était même repassée dans la chambre de son fils et avait essayer de trouver une solution pour réparer ce jouet cassé mais n'avait rien trouvé. Du coup elle était sorti un peu pour prendre l'air façon de parler et avait eu à faire aux regards interrogateurs et surpris de quelques voisins qu'elle avait croisé à son retour. Et comme souvent cela l'affectait mais elle ne leur montrait rien, restant fière devant eux et muette aussi. Ils n'avaient pas à savoir pour quelle raison la milice était passé chez eux, cela ne regardait personne d'autres que sa famille. Et puis de toute façon les rumeurs allaient déjà bon train avant cela donc un peu plus ou un peu moins cela ne changerait pas grand chose.

Ronan fit son apparition quelques temps après son retour et elle répondit simplement à sa question.

"- Non, pas encore."

Ce n'était pas encore l'heure, donc logique qu'il ne soit pas à la maison en même temps. Emma profita qu'il ne soit plus dans la chambre pour retourner ranger un peu ce qu'elle n'avait pas fait avant qu'il ne s'endorme et quand elle sortit il était lui aussi sorti de la salle de bain.

"- Non, personne n'est venu depuis qu'ils sont passés. Pourquoi tu penses qu'on aura droit à d'autres visites ?"

Comme si ce n'était pas suffisant d'avoir à subir une fouille en règle et la mise à mal de son chez soi. Emma espérait qu'il ne disait pas cela pour une raison précise parce qu'elle ne supporterait pas d'autres intrusions de ce genre là.

"- Tu n'as pas beaucoup dormi, tu devrais te reposer encore un peu non ?"

Elle lui disait cela parce qu'habituellement il restait au lit plus longtemps et puis si c'était pour rester là et se toiser en silence autant qu'il retourne se coucher.

Ronan venait tout juste de se réveiller et de se lever. Il n'avait qu'une hâte, retirer ces vêtements de milicien qui le dégoûtaient tellement désormais. Dire qu'il avait toujours voulu faire ça, devenir milicien. Dans son esprit, jeune, il s'imaginait protéger les citoyens de l'Arche, les garder en sécurité dans leur maison volante... Il n'avait jamais imaginé participer à une telle répression, punir des innocents qui n'essayaient que de se protéger eux et leur famille.

Avant tout, il demanda à sa femme si Arthur était rentré. Il n'avait absolument aucune idée de l'heure qu'il était ou du nombre d'heures pendant lesquelles il avait dormi. Si Arthur était là, les deux devaient s'ignorer. Ils devaient donner l'image d'un couple détruit pour protéger leur fils et leur famille... Triste ironie. Après être sorti de la salle de bain, Ronan ne put s'empêcher de demander si quelqu'un était venu. Il craignait de voir les miliciens revenir ou les voisins curieux venir voir ce qu'il se passait chez eux. A la réponse de son épouse, il hésitait sur ce qu'il devait répondre. Il avait envie de la protéger et de lui cacher la vérité, mais ce n'était pas une bonne chose. Elle devait se préparer à la suite des événements, tout comme lui. « C'est certain. Ils reviendront pour fouiller, poser des questions, nous mettre la pression.. C'est ce qu'on fait toujours ! » On. Ce on était sorti tout seul, même si en l'entendant, il se haïssait. Pourtant, il ne pouvait le nier, malgré lui, il était comme eux. Il était obligé de suivre les ordres comme bon nombre d'Inférieurs qui n'étaient pas fiers, eux non plus, de faire tout ça.« On est sur la liste maintenant, on ne nous lâchera plus jamais... On est sur beaucoup trop de listes... » Beaucoup trop pour un régime politique comme celui de l'Arche. Ils étaient souvent passés à travers les mailles du filet et même si cette accusation était fausse, les miliciens et le gouvernement s'en fichaient. « Non, j'ai suffisamment dormi... » Il était encore fatigué, mais il ne souhaitait pas retourner dormir. Il l'avait déjà laissé tout ranger toute seule. « Tu veux rester seule ? » lui demanda-t-il. Peut-être était-ce pour ça qu'elle avait tant insisté tout à l'heure pour qu'il dorme et qu'elle recommençait désormais ?

Emma n'avait pas spécialement envie d'en savoir plus que les raisons pour lesquelles il avait posé cette question mais elle savait qu'il fallait bien qu'en entende son explication. Par contre cela ne lui plaisait pas vraiment alors elle grimaça en écoutant ce qu'il lui expliquait. Ils n'allaient jamais être tranquille alors maintenant. Si elle avait su tout cela avant elle aurait fait plus attention à sa contraception aussi, personne ne lui avait dit qu'on la harcèlerait jusqu'à ce qu'elle pète un câble ou autre. Elle n'aurait jamais imaginé que tomber enceinte d'un second enfant ferait un tel ouragan dans sa vie et dans son couple. Ronan le savait pourtant il aurait pu la mettre en garde bien des fois et malgré ça il ne l'avait jamais fait. Sans doute qu'il se disait qu'elle était assez maligne ou intelligente pour éviter d'en arriver là mais visiblement il l'avait surestimé. Maintenant il fallait faire face aux conséquences et ce n'était pas franchement amusant. Elle soupira pour terminer sans rien ajouter d'autre, montrant déjà bien son mécontentement avec ce qu'elle venait de faire à ce qu'il venait de dire.

"- Vous faites des listes ?"

Ce qu'il avait ajouté la surpris encore plus et poussa un peu sa curiosité. Ensuite elle rappela à Ronan qu'il pouvait encore aller se reposer, il avait le temps avant que leur fils ne rendre. Celui-ci semblait ne pas vouloir se reposer plus ce qui n'étonna pas vraiment Emma, mise à part peu être la question qu'il lui posa ensuite. Du coup elle fut bien obligé de répondre.

"- Non pas vraiment, mais pour être franche, si c'est pour s'ignorer ou se disputer encore je préfère être seule oui."

Au moins c'était dit. Elle n'en pouvait plus de leurs disputes et de ses reproches. Et puis être dans la même pièce que lui et faire comme si elle était seule alors qu'ils n'étaient que tous les deux ne lui plaisait pas plus. Donc autant qu'il sache ce qu'elle pensait.

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