Envoyée en mission - Ronan

Pourquoi avoir envoyé Cassiopée dans les bureaux de la milice ? Pourquoi risquer de griller sa couverture si parfaite ? Cassie savait qu'elle risquait gros, mais elle n'avait pas le choix. Elle était devenue rebelle et savait que l'être s'était prendre ce genre de risque. Cassy devait donc se rendre dans les bureaux afin de cacher un document, un faux bien évidemment, mais celui-ci était le début d'un plan pour renverser le gouvernement en place. Le papier discrédité l'un des membres du gouvernement. Pour que cela soit plus logique Cassiopée avait dû le cacher dans un bureau de façon à ce que quelqu'un puisse tomber dessus un jour prochain, mais tout en faisant attention à ce que l'emplacement ne semble pas étrange. Cassiopée était dans les bureaux, mais pour ne pas que sa présence semble étrange, elle n'avait pas d'autres choix, elle devait être entendue par un milicien. Une fois le document en place, elle s'était rendue dans un bureau en attendant que l'on vienne a elle. Elle tentait de trouver quelque chose excusant sa présence. Elle n'avait qu'à dire qu'elle soupçonnait quelqu'un d'être un rebelle, mais qu'elle avait besoin d'en savoir un peu plus sur tout cela avant de dénoncer cette personne, où elle pouvait essayer de trouver une autre excuse, bien que celle-là pouvait être bonne pour la discréditer une nouvelle fois.

Ronan faisait ce qu'il détestait le plus dans le métier de milicien : écouter les plaintes. Il ne supportait plus d'entendre les membres de l'Arche se dénoncer les uns les autres pour avoir une chance d'être apprécié par le Gouvernement. Lui-même avait dû dénoncer quelqu'un à qui il tenait et il ne s'en remettait pas. Certains semblaient pourtant faire ça avec tant de facilité. Il ne comprendrait jamais. Bref, il n'avait pas le choix, aujourd'hui était de ce jour où il devait prendre chacun des plaintes, traiter des dossiers, remplir des informations sur les habitants suspectés. Aujourd'hui était une journée comme il les détestait. Sauf qu'ici, il n'avait pas son mot à dire, il n'avait pas le choix.

Il avait déjà pris quelques plaintes et était parti prévenir un collègue d'un problème qu'il fallait résoudre au plus vite. Toute la milice, les forces armées et le Gouvernement étaient sous pression, la résistance s'organisait et beaucoup les protégeait. Ronan n'eut pas le temps de discuter davantage qu'il fut appelé. Quelqu'un attendait dans son bureau pour déposer une plainte. Un soupir lui échappa et il se dirigea vers le bureau. En ouvrant la porte, il ne reconnut pas de suite Cassiopée. C''est en passant de l'autre côté du bureau et en s'asseyant qu'il remarqua le visage de la plaignante. « Cassiopée ? » Il fut étonnée. Il la connaissait parce qu'ils étaient voisins et amis. Ils n'étaient pas rare qu'ils discutent ensemble et ils s'entendaient plutôt bien. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle soit du genre à venir dénoncer ou se plaindre, mais il ne la connaissait pas énormément et avait dû se tromper. « Tu es donc là pour déposer une plainte, pour commencer j'ai besoin d'informations sur toi comme ton prénom, ton nom, ton âge, ta date de naissance, ton rang, si tu as des condamnations ou des mises en garde, ton statut familial, ton métier et enfin la personne que tu viens dénoncer, si c'est une personne et son infraction. » Comme à tous les autres, il lui demandait le blabla habituel pour s'assurer de son identité, même si là, il n'y avait aucun doute. Et toutes les informations utiles qu'il devait entrer dans le dossier de plainte.

Cassiopée était ici en mission, elle devait déposer un document pour la résistance. Le moindre faux pas pouvait lui être fatal. Elle devait garder son sang-froid, elle devait être calme et le plus naturelle possible. Avant de repartir, pour plus de crédibilité, elle avait dû s’arrêter dans un bureau afin de déposer une plainte… une fausse plainte. Et qui était venu lui prendre ? Ronan. Pourquoi lui et pas un autre ? Ils se connaissaient bien, elle avait intérêt à faire attention et à bien jouer la comédie, elle devait se montrer le plus sincère possible. « Cassiopée Harper, 26 ans, née le 26 août 2236, Inférieure, aucune condamnation, aucune mise en garde, mariée, professeure. » Cassiopée marquait une courte pause, c’était maintenant le moment de dénoncer un homme qu’elle savait innocent. Innocent pour le crime qu’elle allait dénoncer en tous cas. Mais elle n’avait pas le choix. « Ronan, tu sais à quel point je suis dévouée à l’Arche. J’ai appris quelque chose de très important sur un des prisonniers. Il serait à la tête d’un groupe de résistant. J’ai entendu une conversation, les personnes disaient très clairement son nom. J’ai essayé de voir qui était en train de parler, mais quand je suis arrivée, ils avaient disparu. Je suis certaine que si vous fouillez son appartement, vous y trouverez des preuves. » Cassiopée et son groupe de résistant avait tout prévu. Elle allait là-bas, mais elle devait avoir un alibi solide. Elle ne devait pas y être allée sans raison. Pour cela, certains résistants avaient placé des documents qui parlait de résistance, aucun nom, Cassy refusait de dénoncer qui que ce soit, sauf cet homme qu’elle savait déjà condamné à mort. « Je sais qu’il était arrêté pour tout autre chose, mais je suis certaine de ce que j’avance. Du moins, je suis certaine de ce que j’ai entendu et j’ai cru comprendre qu’il ne fallait prendre aucun risque avec la résistance, alors j’ai préféré venir ici. Peut-être qu’en fouillant son appartement vous trouverez d’autres noms, peut-être que vous trouverez plus d’information pour arrêter ces personnes mal intentionnées. » Cassiopée jouait un double jeu, elle n’avait pas d’autre choix si elle voulait garder sa couverture. Elle devait faire croire qu’elle était toujours très fidèle à l’Arche et qu’elle était toujours prête à tout pour elle.

Ronan ne pensait pas, un jour, tomber sur Cassiopée dans ce bureau. Bien sûr, elle pouvait être là pour bien des raisons valables, mais en ce moment, il n'avait le droit qu'aux dénonciations basées sur rien. Alors, il s'imaginait que c'était son cas à elle aussi. Il ne la connaissait pas si bien et, comme tous les habitants de l'Arche, lui le premier, elle n'était peut-être plus celle qu'elle était autrefois. Comme à son habitude, après s'être installée, Ronan posa les questions habituelles sur l'identité et les raisons de la plainte. A mesure où elle donnait les informations qu'il connaissait pour la plupart, il entrait les informations dans le dossier de plainte. Lorsqu'elle commença à parler de l'Arche, Ronan l'observa silencieusement et sérieusement, cherchant à déceler le moindre mensonge comme on lui avait appris.

Elle commença par expliquer à quel point elle était dévouée à l'Arche. Comme beaucoup. En tout cas, personne n'osait dire le contraire, pas même Ronan. Encore une dénonciation de résistant, mais cette fois-ci, semble-t-il, d'un chef de la résistance. Ronan fut d'autant plus intrigué par cette révélation que le résistant en question était déjà en prison. A quoi bon venir le dénoncer puisqu'il était déjà condamné à mort ? Il y avait bien des raisons de le faire, en effet, mais Ronan était fatigué de toutes ces plaintes. « Son nom ? Son rang ? » demanda-t-il dans un premier temps après avoir fini de prendre des notes de cette plainte. « Pourquoi le dénoncer s'il est déjà condamné ? » demanda-t-il bêtement. Il ne devait rien laisser paraître ! Il était logique de dénoncer quelqu'un pour un autre crime que celui pour lequel il était puni si cela pouvait le conduire à la peine de mort ou à une peine supérieure. « Pardon ! Tu as raison de le dénoncer. Les résistants sont un véritable danger pour l'Arche. Ils s'imaginent protéger les Inférieurs et réclamer l'égalité, mais ce n'est pas ce qu'ils font ! Ils mettent en danger l'équilibre déjà fragile de notre communauté et mettent en danger tous les Inférieurs. Le moindre suspect doit être dénoncé. » Il ne pensait peut-être pas tout, mais c'était son rôle de le faire croire et de faire ce petit discours à tout le monde. « Je te dois néanmoins de te poser la question : es-tu sûre de ce que tu avances ? Si cet homme est déjà condamné, on ne cherchera pas plus loin et toute sa famille pourrait être en danger, alors es-tu sûre de toi Cassiopée ? »

Après avoir donné l’identité de celui qu’elle accusait, elle écoutait Ronan lui demander pourquoi dénoncer un homme déjà condamné. « Parce qu’il est un véritable danger pour l’Arche. Il est peut-être condamné, mais je ne sais pas pour quel crime. Et s’il sortait et qu’il mettait ses plans à exécutions ? Et puis, je le dénonce aussi pour que vous puissiez trouver ses complices, s’il en a. » Il y avait de faux documents chez l’homme que Cassiopée venait de dénoncer, les autres résistants de son groupe devait s’en charger avant qu’elle ne vienne ici. Normalement, aucun autre nom n’apparaissait sur les documents, elle ne voulait pas dénoncer d’autres personnes "innocentes" et ils ne pouvaient pas donner que des noms de personnes déjà en prison. Cassiopée écoutait chacun des mots sortant de la bouche de Ronan. Elle devait garder son calme et ne réagir à aucune de ses paroles dénigrant les résistants. Elle savait qu’il se devait de dire tout cela et ne savait pas s’il pensait réellement ce qu’il était en train de dire, mais ça énervait tout de même intérieurement Cassy. « J’en suis certaine Ronan. J’ai entendu ces hommes parler, ils pensaient être seuls, ils pensaient pouvoir parler librement. Je ne sais pas s’il a de la famille et je ne veux pas le savoir. Mais je préfères protéger l’Arche toute entière que quelques personnes. » En réalité, Cassiopée savait très bien qui était sa famille. Une femme bien trop malade qui ne devrait pas tarder à rendre l’âme. Aucun enfant à cause de la stérilité qui a toujours causé du tord à cette famille. Les résistants n’avaient pas choisi n’importe quelle personne. Ils avaient pris du temps à étudier qui dénoncer pour se protéger. Cassy était prête à tellement de chose pour la résistance, mais elle refusait de mener des innocents à la mort. « Ronan, nous sommes d’accord, tout ce qui est dit dans cette pièce reste confidentiel ? Si la résistance sait que j’ai dénoncer un des leurs, je dois avouer que j’ai peur pour ma vie. J’ai peur qu’ils s’en prennent à moi pour montrer leur détermination. Ils sont prêt à tout, même à assassiner une Inférieure si elle respecte l’Arche. » Se montrer craintive par rapport à la résistance, il n’y avait rien de mieux pour améliorer un peu plus sa couverture.

Les mots de Cassiopée étonnaient Ronan, mais il ne laissait rien paraître. En réalité, il n'avait rien personnellement contre les résistants. Peut-être mettaient-ils en danger l'Arche, et alors ? Avec tout ce qui venait de se passer, méritaient-ils tous encore d'avoir une nouvelle chance ? Et dans le fond, ces résistants n'avaient-ils pas raison ? Ils réclamaient la justice et l'égalité. Ils étaient des êtres humains avant d'être des Inférieurs ou des Supérieurs. Le vrai problème de cette résistance, c'était en réalité ce qui en découlait : le durcissement des lois, la répression plus forte encore et l'ambiance qui régnait désormais entre les différents membres de l'Arche. Ce n'était plus que dénonciations et craintes. Chacun craignait pour sa vie ou celle de sa famille, innocent ou coupable. Personne n'était à l'abri. Ronan se força à sortir de ses pensées, reposant son attention sur sa voisine. « Tu as fait ce qu'il faut ! Et je peux t'assurer que s'il a des complices, nous les trouverons. » Parce que les miliciens avaient ordre de ne reculer devant rien et d'arrêter quiconque appartenait à la résistance, peu importe à quel degrés.

Néanmoins Ronan trouvait important de demander davantage d'informations, ou plutôt de s'assurer que Cassie ne se trompait pas. La vie d'un homme, d'une famille et peut-être de voisins en dépendait. « Bien, alors ta plainte est enregistrée. As-tu vu à quoi ressemblaient les autres hommes ? Le moindre indice peut nous être utile ! » Un signe particulier, une voix particulière, une façon de parler. Tout pouvait les aider à les arrêter. Et puis, s'ils ne trouvaient personne, si le Gouvernement leur mettait trop la pression, ils déposeraient de fausses preuves comme on leur avait déjà demandé de le faire. Après avoir ajouté quelques notes, Cassiopée reprit la parole. Il comprenait ses craintes, elles étaient légitimes, mais malheureusement, il ne pouvait lui promettre ni le secret absolu, ni la sécurité. Il prit une seconde pour réfléchir à ce qu'il devait répondre. Il devait, avant tout, penser à la sécurité de l'Arche et ne pas créer la panique en supposant que les miliciens ne pouvaient assurer la sécurité des dénonciateurs. « Ton nom sera sur le dossier, il m'est impossible de faire autrement. Toutes les personnes ayant accès à ce dossier auront, par conséquence, accès à ton nom... » commença-t-il. Toutes les dénonciations devaient être accompagnées du nom de leur auteur. Et tous les dossiers étaient lues par une dizaine de personnes, parfois plus selon l'ampleur du procès. « Je ne peux t'assurer que personne ne s'en prendra à toi, mais nous sommes prudents. Chaque personne qui consulte un dossier doit signer un document, alors s'ils sont prudents, personne ne s'en prendra à toi... » Ce n'était pas rassurant, mais il ne pouvait dire mieux. Si quelqu'un s'en prenait à elle, il y avait de fortes chances pour que son nom soit indiqué quelque part. Prendraient-ils le risque ? Les résistants après tout n'avaient rien à perdre, mais ça, il préférait le taire. « Si certaines personnes savent que tu es ici, je te conseille de leur mentir. Explique que tu es venue dénoncer un autre crime, ne parle pas de la résistance. Tu ne sais pas, même parmi tes amis, tu ne peux faire confiance à personne. » lui conseilla-t-il, ne sachant quoi faire d'autre.

Un simple signe de la tête en guise de réponse. Cassiopée venait de faire ce qu’il fallait, elle en était certaine. Simplement, il ne s’agissait pas de la fausse dénonciation, mais du document qu’elle avait placée secrètement dans les bureaux de la milice. Son mensonge était nécessaire, obligatoire même, pour ne pas dire vitale. Si elle n’avait pas cette dénonciation pour excuse, elle aurait certainement eu de grave ennuie avec la milice. « Non, je n’ai rien vu. J’ai entendu ces hommes parler et quand j’ai fait le tour pour aller voir qui été en train de parler, ils n’étaient plus là. J’ai essayé d’être discrète, mais en marchant, je me suis cognée, je pensais que le bruit n’avait pas été trop audible, mais j’ai dû me tromper. Je ne les ai pas vus. Les voix ne m’étaient pas familières, enfin, elles n’avaient rien d’originale, rien qui pourrait vous aider à retrouver une personne en particulier. Je suis désolée, je sais que sur ce coup-là, je ne suis pas très utile. » Cassiopée n’avait rien entendu de particulier, d’ailleurs, elle n’avait rien entendu du tout. Cette conversation était aussi imaginaire que le reste de son histoire. Elle n’avait pas envie de dénoncer une personne sans le vouloir. Si elle donnait un détail, un simple petit détail qui pourrait sembler sans importance, elle savait qu’elle pouvait condamner n’importe qu’elle personne de l’Arche, parce qu’il n’y avait pas réellement de jugement dans ces affaires-là. On cherchait à arrêter sans chercher de preuves. Cassiopée n’était pas là pour mener des innocents en prison, elle était là pour la justice et l’égalité de l’Arche, de ses habitants. Elle était là pour les Inférieurs. « Je comprends. Mon nom doit apparaître sur le dossier, c’est normal. Pas rassurant, mais normal. Après tout, je fais confiance aux autorités, à l’Arche… Ils sont là pour nous protéger. » Ces phrases sonnaient tellement faux dans l’esprit de Cassy. Elle n’en pensait plus un mot, mais elle n’avait plus le choix, elle devait continuer à faire semblant, encore et toujours, le plus longtemps possible. Et puis même si dans le fond des personnes pouvaient réellement s’en prendre à elle, des résistants au sein des autorités ignorants ce qu’était Cassy, ils seraient imprudents. La première chose que l’on apprend en entrant dans la résistance, c’est la discrétion. En s’en prenant à une personne qui dénonce des résistants on se trahit soi-même. Cassiopée ne devait pas trop avoir de problème de ce côté-là. « D’accord, je trouverais une autre excuse pour expliquer ma présence. » Encore une. « Ronan, la résistance est si dangereuse que ça ? Tu penses qu’elle peut réellement détruire l’Arche ? » Cassiopée en était certaine, il ne fallait pas sous-estimer les capacités et la détermination de la résistance. « C’est qu’on commence à tous craindre les autres. On commence à se demander si les personnes avec qui l’on parle, les personnes que l’on croise n’en font pas parti. Vous ne savez pas comment les reconnaître ? Où plutôt comment les avoir à leur propre jeu ? » Cassy mimait l’inquiétude, celle de savoir un jour l’Arche aux mains des résistants, mais en réalité elle rêvait de ce jour. Et si au passage, elle pouvait obtenir quelques informations, elle ne serait pas contre.

L'histoire de Cassiopée était possible, probable. Cela suffisait à Ronan. Il n'avait ni le temps, ni l'envie de se prendre la tête. Il avait confiance en cette fille, même s'il était étonné de la voir prendre part à ce mouvement de dénonciation. Tout le monde le faisait, alors pourquoi était-il étonné ? Lui-même avait dénoncé, même si ce n'était pas dans les mêmes circonstances. L'Arche et ses lois avaient fait des derniers êtres humains ce qu'ils étaient aujourd'hui. « Où était-ce ? Combien de voix différentes as-tu entendu ? Des hommes uniquement, des femmes ? » Elle n'avait aucun détail ? Ça, par contre, ça paraissait étrange aux yeux de Ronan, mais il ne souhaitait pas s'y attarder. Il préférait simplement insister un peu pour obtenir des réponses. Ses supérieurs allaient bien rire en voyant un dossier avec si peu de détails. Alors il essayait de la faire parler, de faire qu'elle se souvienne d'un détail.

Cassie s'inquiétait que son nom apparaisse sur le dossier. Malheureusement, Ronan ne pouvait rien y faire. Il ne pouvait pas contourner cette obligation sans avoir lui-même de problèmes. Il lui promettait qu'elle ne risquait rien et essayait de la rassurer. Les dossiers étaient normalement en sécurité, protégés et toute personne qui le lisait devait noter son nom. Bien sûr, il n'était peut-être pas si compliqué de contourner ces règles, mais cela devait suffire à la rassurer, non ? Au moins à la mettre en confiance pour qu'elle parle davantage et qu'elle se libère. Ronan essaya de contrôler les expressions de son visage lorsqu'elle affirma avoir confiance en l'Arche et ses autorités. Ce n'était qu'une Inférieure, peut-être ne devrait-elle pas avoir tant confiance ? Enfin, il n'avait rien à dire s'il ne voulait pas se mettre en danger.

La jeune femme semblait inquiète. Dans le fond, avec toutes les affaires en cours en l'espace de quelques jours, elle avait de quoi être inquiète. La résistance était préparée, prête à l'action. Ils étaient bien plus nombreux qu'il n'y paraissait. Mais les questions de Cassiopée étaient déplacées. Il était là pour travailler et recueillir les plaintes, il n'avait pas son mot à dire. « La résistance détruira l'Arche telle qu'on la connaît si on la laisse faire. Peut-être que les idées sont justes, je n'en sais rien et je n'ai pas mon mot à dire, mais les actions qu'ils mènent sont dangereuses, mettent en danger la vie d'innocents... Ils veulent affronter l'ordre établi et le pouvoir. La lutte ce n'est jamais bon, il y a toujours des perdants des deux côtés ! » confia-t-il. « Quant à les reconnaître, c'est impossible ! Ils sont intelligents, ils se cachent et jouent parfaitement le jeu. Ils ressemblent aux loyaux, se comportent comme eux. Peut-être faut-il se méfier de ceux qui critiquent le Gouvernement, ou une loi ? Ceux qui se réunissent discrètement sont suspects également. Tout comme ceux ayant enfreint les règles de l'Arche. » Comme c'était le cas pour Ronan. En d'autres mots, tous pouvaient être suspectés et coupables. Il était impossible de les avoir, pas facilement en tout cas. Sinon cette rébellion aurait déjà été étouffée.

Ronan continuait à poser des questions, il voulait des détails, mais Cassiopée n’en avait pas à fournir, elle ne voulait pas que ses dires ciblent directement des personnes. « Il n’y avait que des voix masculines. Je dirais trois voix différentes, donc trois hommes. Je travaillais tard, j’avais des copies à corriger et je préférais le faire dans ma salle de classe. C’est en sortant que j’ai entendu ces hommes parler. Quand j’ai essayé de les surprendre, ils n’étaient plus là. » Elle devait tout de même donner quelques détails, faire semblant d’être certaines de certaines choses, avoir prêté attention à quelques petites choses, elle devait être crédible, elle n’avait pas le choix. Ronan devait la croire, ce n’était pas possible autrement.

Cassiopée devait jouer un jeu devant toutes les personnes de l’Arche. Ses amis, son époux, ses connaissances, personnes ne savait qui elle était réellement devenue. Personne ne devait le savoir pour sa propre protection, mais aussi pour celle de ses proches, s’ils étaient au courant, il y avait plus de risque pour qu’il leur arrive malheur le jour ou Cassy se ferait prendre, si elle se faisait prendre un jour. « Je vois, c’est compliqué de les démasquer. Ce n’est pas rassurant, n’importe qui peu appartenir à la résistance. Nous ne pouvons plus avoir confiance en personne. Ça devient compliqué, on commence à suspecter tout le monde. J’espère que vous arriverez vite à étouffer la rébellion, je vous y encourage. Je sais que ce n’est pas simple pour tout le monde de vivre ici, certaines personnes s’en plaignent, mais ils ne comprennent sans doute pas l’enjeu, le danger que cela représente. Je ne sais pas quand, ni même comment tout cela va terminer, mais je crains le pire. » Cassiopée savait très bien de quoi elle parlait, puisqu’elle faisait elle-même partie de la résistance. Elle connaissait les risques, elle savait qu’elle pouvait condamner des innocents, en blesser, parfois même en mener jusqu’à la mort, mais dans une guerre, il y avait des victimes, c’était normal. Personne ne pouvait mener de combat sans perte. Cassiopée ne voulait juste pas toucher un innocent de façon directe, mais si c’était fait indirectement, elle ne pouvait pas s’en vouloir, elle faisait cela pour le bien de nombreuses personnes ici. Il n’était pas question d’y mettre fin, elle comptait bien aller jusqu’au bout, peu importe où tout cela pouvait la mener. Elle était déterminée et rien ni personne ne pouvait l’arrêter.

Ronan prenait note de chaque détail que Cassie donnait. Elle en donnait peu, vraiment. Elle ne semblait avoir rien vu, rien aperçu, rien entendu de particulier. Elle ne lui apportait pas beaucoup d'aide, pour ne pas dire aucune. Avec si peu de détails, cette plainte n'allait mener, certainement, à rien, hormis pour cet homme déjà arrêté. « Donc, c'était devant l'école commune ? » Si c'était le cas, peut-être était-ce des professeurs ? Trois hommes, trois professeurs. C'était une piste bien maigre, mais si la réponse était positive, elle devait être suivie.

A la demande de son amie, Ronan essayait de lui expliquer qu'il était impossible de reconnaître les résistants. Ils se cachaient, n'exprimaient pas leurs idées à voix haute. La discrétion était leur principale règle. Elle pouvait simplement se méfier de ceux ayant déjà émis l'idée que le Gouvernement faisait mal son travail, que les inégalités étaient injustes. Mais il était impossible de clairement identifier les rebelles. Si c'était le cas, le travail de Ronan et des autres miliciens auraient été grandement facilité. Elle avait raison ! Tout le monde pouvait faire partie de la résistance. Même celui qui paraissait le plus loyal pouvait être coupable. « C'est ça, malheureusement ! On ne peut plus faire confiance, à personne ! Il faut être méfiant, il faut faire attention à chacune de nos fréquentations, de nos connaissances. Même nos plus proches amis peuvent être coupables. Et si l'on veut être un bon citoyen de l'Arche, peu importe le coupable, il faut être capable de le dénoncer... » lâcha-t-il. Clairement, si Cassiopée connaissait les trois hommes ou l'un des trois hommes, s'ils étaient des collègues, elle devait les dénoncer et ce, peu importe ses liens avec. « Je crains le pire également... Les choses commencent à devenir dangereuses. Les résistants sont partout et sont nombreux. » Peut-être ne devait-il pas confier cela. « Fais attention à toi Cassiopée, reste prudente ! » Il ne voulait pas qu'elle soit touchée par ces résistants, ces rébellions qui mettaient la vie d'innocents en danger.

Ronan posait beaucoup de questions, il cherchait à avoir des détails, ce qui était ennuyeux pour Cassiopée qui n’en avait pas, son histoire étant totalement inventée. « Non. Ce n’était pas devant, ce n’était pas loin, je pense que la nuance est importante. C’est en sortant de ma classe, puis de l’école que j’ai entendu ces voix. Elles ne m’étaient pas familières. Je ne dirais pas qu’il s’agissait de professeur, j’ai l’habitude de discuter avec eux et je n’en ai pas reconnu un seul parmi les voix masculines que j’ai entendu. Après, ce n’est que mon avis Ronan, mais je pense qu’il peut être important dans votre enquête, désolée si ce n’est pas le cas. » Elle devait faire semblant d’essayer d’être précise, d’essayer d’aider au mieux Ronan et la milice, mais rien de tout cela n’était vrai. Elle essayait de ne pas faire accuser les professeurs, car elle les connaissaient tous et elle n’avait pas envie d’avoir leur condamnation sur le dos, ni même sur la conscience.

« J’essayerais d’être attentive, je ne veux pas me retrouver parmi les résistants. Très honnêtement, ils me font peur. Tu sais à quel point je suis dévouée à l’Arche, alors même si je fais partie des Inférieurs, les résistants pourraient peut-être s’en prendre à moi. » Elle devait jouer le jeu une fois de plus. « Tu devrais faire attention à toi aussi Ronan. Tu es un bon ami et je n’ai pas envie qu’il t’arrive malheur. Je sais qu’avec ton métier, ce n’est pas simple, tu es une cible facile, alors fait très attention. » Cassy avait raison, les résistants avaient de nombreuses fois évoqués que les miliciens étaient des cibles, qu’il fallait s’en débarrasser surtout s’ils savaient qu’ils étaient fidèles à l’Arche et même si Ronan avait fait des erreurs par le passé, il était une cible pour les résistants, Cassy le savait mieux que personne, mais elle tenait à son ami et n’avait pas envie qu’il lui arrive quoi que ce soit. Cassy n’avait elle pas de raison de s’en faire, elle était du côté des résistants, ils ne devaient pas s’en prendre à elle, normalement, si tout se passait bien et comme prévu.

Ronan notait les nouveaux détails que Cassiopée lui donnait. Elle n'avait pas vu les résistants devant l'école, mais un peu plus loin. L'idée alors qu'il pouvait s'agir de professeurs tombait à l'eau. Enfin, il pouvait toujours s'agir de professeurs, mais la probabilité était sans doute moins importante. « Je crains que tout cela ne nous aide pas beaucoup... » Soupira-t-il tout en terminant une note. « Tu as eu raison de venir, mais je pense que nous ne pourrons arrêter personne avec de si maigres informations. Si des souvenirs, des détails te reviennent, il faut que tu viennes me voir immédiatement, d'accord ? » Elle n'y était pour rien si elle n'avait pas plus d'informations, mais il avait l'impression de tourner en rond.

« Je le sais Cassiopée. Ils font peur à beaucoup de monde ici, sur l'Arche. » souffla-t-il. Les Résistants étaient plus nombreux qu'il ne le pensait au début et étaient forts, déterminés et préparés. Il semblait impossible de les arrêter. « Je sais que tu es dévouée à l'Arche, et eux le savent sans doute aussi. Reste sur tes gardes, mais ne t'inquiète pas trop. On les arrêtera vite. » Ce n'était pas vrai. Il savait que la situation était plus compliquée et que tous les loyaux risquaient gros. Cassie en faisait partie, mais il espérait que rien ne lui arriverait. « Ne t'inquiète pas pour moi, Cassiopée. Je sais ce que nous risquons. Les miliciens seront sans doute les premières cibles chez les Inférieurs. Nous participons à toutes ces inégalités qu'ils rejettent. Je suis prudent, je te le promets. » Ils étaient amis, elle s'inquiétait pour lui comme lui s'inquiétait pour elle. Elle avait tellement raison, il savait qu'à un moment ou à un autre, les miliciens seraient une cible, mais il n'y pouvait rien. Il devait continuer d'être là, de travailler, quoi qu'il se passe. « Tu n'as plus rien à ajouter au dossier ? » Demanda-t-il, pour savoir s'il pouvait tout fermer.

"Je suis désolée, j'aurais vraiment aimée vous aider un peu plus. Mais je reviendrais vous donner plus de détails si quelque chose me revient, il n'y a aucun problème, tu peux compter sur moi." Cassy savait que ce qu'elle avait dit n'allait pas aider, mais c'était ce qu'elle recherchait, elle ne voulait pas donner beaucoup d'information, pour ne pas mener les miliciens à arrêter des innocents. Cassiopée n'allait bien évidemment, pas revenir avec des informations supplémentaires, puisqu'elle n'allait jamais en avoir. Tout était faux et elle n'allait pas en inventer plus au risque de se faire démasquer.

"Je l'espère Ronan, mais j'ai confiance en vous, en l'Arche, je sais que vous faîtes du mieux que vous pouvez pour nous protéger et arrêter ces résistants qui mettent la vie de l'Arche en péril." Mensonge. Cette phrase était totalement fausse, elle avait confiance en Ronan, mais pour tout autre chose, elle n'avait pas confiance en l'Arche, en ses lois, en son gouvernement... Elle détestait tout cela et c'est pourquoi elle avait rejoint la résistance, pour y mettre fin une bonne fois pour toute. "D'accord Ronan." Pour le coup, elle était sincère, elle tenait à Ronan et n'avait pas envie qu'il lui arrive quelque chose de mal. Ronan était son ami et elle voulait le protéger du mieux qu'elle pouvait, même si avec son travail tout était très risqué pour lui. "Non, je n'ai rien à ajouter. Malheureusement, je n'ai pas plus de détail et rien ne me revient pour l'instant. Je ne sais pas si c'est possible, mais est-ce que tu pourrais me tenir au courant de l'avancement de ma plainte ? S'il te plait. J'ai besoin de savoir à quoi elle mène. " Et surtout besoin d'en apprendre plus, de savoir qui était suspecté, qui au contraire ne l'était pas. Toutes les informations étaient bonnes à prendre.

« Ce n'est rien, tu es venue et c'est déjà très bien ! » affirma Ronan. Elle aurait très bien pu garder ça pour elle, elle ne l'avait pas fait. Alors même si elle avait donné assez peu d'informations et que ces dernières ne pourraient sans doute pas être utilisables, elle avait au moins respecté les lois de l'Arche en dénonçant des Résistants.

La situation ne devait être simple pour personnes. Lui, il était milicien et il devait respecter les règles sans réfléchir et sans discuter. Elle, elle devait vivre avec sa crainte des Résistants. Ils n'avaient malheureusement pas la chance de vivre sur une Arche où les habitants étaient unis. Les derniers êtres humains allaient se détruire, ou détruire la nouvelle Terre comme ils avaient détruit l'ancienne. « merci Cassiopée. » C'était un merci sincère. Il était rare, finalement, que les miliciens reçoivent un quelconque soutien. Ils étaient souvent vu comme les méchants, surtout ces derniers temps. Alors voir son amie lui donner un peu de soutien, ça faisait du bien. « Bien sûr, je passerai te voir dès qu'il y aura du nouveau. Je te conseille de ne pas repasser ici pour obtenir des nouvelles, les autres se demanderaient pourquoi tu passes si souvent ! » Il ne faisait que la protéger. « Si tu apprends la moindre chose, le moindre détail reviens me voir, mais fais attention à toi. » Elle ne devait pas se mettre en danger, si elle apprenait des choses par hasard, alors elle les lui dirait, mais elle ne devait pas chercher à obtenir des informations. « Ne t'inquiète pas, je suis sûre que cette affaire sera bientôt derrière nous. » Il n'y croyait pas une seule seconde lui-même, mais il voulait la rassurer.

La discussion entre les deux amis prenait fin, Cassiopée n’avait plus rien à ajouter et Ronan ne semblait plus avoir de questions à poser. Par curiosité et parce qu’elle voulait savoir si ce qu’elle avait dit aller les mener à quelque chose, la brune avait demandé à son ami de la tenir au courant de l’avancée de l’enquête, même si elle doutait que ce qu’elle avait dit aller les amener à faire véritablement des recherches. « Je te remercie Ronan. Et ne t’en fais pas, je ne viendrais pas demander des informations ici, j’attendrais que tu viennes vers moi pour me tenir au courant de l’avancement s’il y en a un. Et je te promets de revenir te voir dès que j’en apprends plus, je serais prudente, ne t’en fais pas. » Elle faisait toujours en sorte d’être prudente, elle promettait à son ami qu’elle allait l’être de nouveau, elle promettait en réalité de faire attention en étant dans la résistance, même si Ronan ne savait rien de tout cela, les phrases de Cassy avaient souvent un double sens, surtout depuis qu’elle avait radicalement changé de côté. « Je l’espère sincèrement Ronan, je ne veux plus vivre dans l’incertitude et dans la crainte. » Elle était une fois de plus sincère, mais ses paroles n’avaient pas le même sens pour Ronan et pour elle. Elle, elle voulait une révolte pour que les choses changent, pour qu’elle n’ai plus à vivre dans l’incertitude face aux Supérieurs, dans la crainte d’être accusée de tout et n’importe quoi, ce n’était pas la révolution qui lui faisait peur, elle était la révolution. « Je pense que je vais te laisser travailler Ronan, je n’ai malheureusement rien de plus à te dire et je suis certaine que tu as des tas d’autres choses à faire. » Souriant à son ami, elle s’était levée de sa chaise. Elle avait envie de quitter les lieux qui la rendait mal à l’aise, elle voulait retrouver son appartement, le seul endroit avec la résistance où elle se sentait bien. Après quelques échanges de politesse, Cassy s’était approché de la porte du bureau et l’avait franchi, avant de quitter les bureaux de la milice et de rejoindre son mari chez elle.

Ronan mit en garde Cassiopée. Elle ne devait pas venir ici trop souvent, sans quoi les Résistants pourraient se poser des questions et s'en prendre à elle. Elle voulait des informations et Ronan pouvait le comprendre. Il viendrait alors à elle pour l'informer des nouveautés et des avancements. Après tout, il pouvait juste être un ami rendant visite à une amie, alors qu'elle en venant au poste de milice passerait seulement pour quelqu'un qui les renseigne. En revanche, il lui demandait de venir le voir si elle avait d'autres informations. Elle n'aurait alors qu'à lui rendre visite chez lui pour l'en informer.

Les deux amis parlaient depuis un moment déjà. Ronan semblait avoir toutes les informations que Cassie pouvait fournir, alors elle n'avait plus aucune raison de rester. Ronan venait de refermer le dossier et écoutait Cassie. « A plus tard Cassiopée, et n'oublie surtout pas de venir me voir si tu as le moindre détail qui te revient. » Lui lança-t-il en souriant avant de la laisser quitter le bureau et de se remettre, lui, au travail.