À huis clos - Fantine (TERMINÉ)

Orion regarda à nouveau sa main, faisant glisser les deux cartes contre la table. Il y jeta un coup d’œil rapide. Ouais. Malheureusement ce n'était pas en les regardant toutes les deux minutes qu'elles allaient changer apparemment. Son visage ne trahit cependant aucune pensée et resta de marbre. Avec son 6 et son valet, et vu les cartes dealées au milieu de la table, il ne disposait présentement que d'une paire de 6... Ces derniers temps, il semblait avoir perdu sa chance. Ou était-ce aussi parce qu'il avait perdu sa concentration ?
Son téléphone sonna, vibrant contre sa jambe. Il sortit rapidement l'objet et consulta le message. Sauvé par le gong ! Au moins, il avait une excuse pour se coucher sans avoir à continuer la partie. Il frappa la table en se levant, lançant à ses adversaires :
« Désolé, mais je vais devoir vous plumer un autre jour on dirait ! »
L'un rit de manière ironique, une autre grommela une sorte de "allé casse-toi", et un dernier lui adressa un clin d’œil amusé.
« Je me couche. »
Et il jeta ses cartes face cachée contre la table puis s'éloigna. Téléphone à la main, il survola une nouvelle fois le message qui lui donnait une mission urgente : il y avait apparemment eu un court circuit au cabinet médical. Afin de pouvoir continuer à voir les patients, il fallait qu'Orion vienne vérifier - et réparer tout ça - pour que les scans, analyseurs de sang et autres machines médicales puissent de nouveau fonctionner. Il remit son portable dans sa poche et prit la direction du couloir Est*. Après quelques minutes de marche, il arriva à l’ascenseur qui allait le mener directement à l'entrée du cabinet médical, qui se trouvait à quelques étages au dessus.
« Cabinet médical. »
Appela t-il à voix haute. Une voix robotique lui répondit aussitôt "Appel de l’ascenseur en cours, veuillez patienter." et une demie seconde plus tard, deux larges portes s'ouvrirent devant lui. Il s'engouffra tandis que la voix robotique annonçait le lieu où ils étaient, avant d'annoncer le lieu où ils allaient. Il adressa un sourire charmeur à la jeune femme qui s'y trouvait, et alla se caler derrière elle, le dos appuyé contre le fonds de l'ascenseur. Il s'arrêtèrent à nouveau et la jeune femme s'en alla, laissant entrer...
Fantine. C'était Fantine. Elle se trouvait en face de lui, pour de vrai. Après de longs mois pendant lesquels elle avait réussi à l'éviter autant que faire se peut, elle se trouvait désormais face à lui. Il la vit hésiter un instant, mais les portes se refermèrent derrière elle. Elle était désormais coincée avec lui. Voyant à quel point cela semblait lui faire plaisir, Orion serra les dents, les muscles de ses mâchoires se contractant à plusieurs reprises. Son cœur se serra. Putain ce qu'elle était belle.
La colère se distilla à travers ses veines tandis qu'elle fuyait son regard. Il ne lui laissa alors pas le loisir de lui adresser la première un bonjour insipide et cruellement banal :
« Ne t'inquiète pas, je ne te forcerai pas à me parler. »
Ses mots avaient été durs et secs. Il continuait pourtant de la regarder, ne pouvant détourner le regard, tel un homme assoiffé buvant à une source d'eau fraiche. Il suivit des yeux les courbes de son visage, visage qui, si l'on avait été il y a encore quelques mois de cela, il se serait empressé de couvrir de baisers.
C'est alors que l'ascenseur s'arrêta d'un seul coup, le faisant tituber. Les lumières tremblotèrent puis s'éteignirent. Nan mais c'était. Pas. Possible.

Fantine était plongée dans son travail, passionnée par ce qu'elle faisait, elle pouvait y passer des heures, surtout en ce moment. Elle aimait se réfugier dans son travail pour ne pas penser, pour ne pas devoir affronter le regard des autres. Alors une fois de plus, elle était très concentrée, son travail de scientifique n'était pas à prendre à la légère, ce qu'elle faisait était très important pour leur prochaine destination. La brune discutait avec un collègue, ils faisaient tous les deux un travail similaire et s'aidaient parfois. Il ne la jugeait pas pour ses erreurs, alors discuter et travailler avec lui n'était pas compliqué. Après de longues minutes de discussions, les deux s'étaient posés une question essentielle sur le milieu naturel d'un des animaux dont l'ADN devait être recréé. Le problème étant qu'aucun d'eux n'avait la réponse et avant d'aller fouiller les archives une fois encore, Fantine préférait aller au parc naturel, les personnes qui y travaillaient connaissaient beaucoup de choses à ce sujet et elles pouvaient aider Fantine en lui faisant gagner un temps précieux.

Quittant les lieux, la brune s'était rendue devant un ascenseur pour se rendre au parc naturel. Elle patientait quelques instants avant que l'ascenseur n'arrive, elle souriait à la femme qui quittait les lieux, s'apprêtant à entrer à son tour, mais il était là, celui qu'elle évitait depuis trois mois maintenant était là, dans cet ascenseur. Fantine hésitait, devait-elle se montrer forte et entrer dans l'ascenseur ou fuir et attendre le prochain ? Elle n'allait être avec lui qu'un court instant, alors elle pouvait le faire, elle pouvait entrer, regarder ailleurs et ne lui adresser aucun mot, elle en était capable. La brune était entrée, se calant dans un coin de l'ascenseur, elle n'avait qu'une hâte, en sortir. Orion s'était adressé à elle et son coeur s'était emballé, elle n'avait pas entendu sa voix depuis des mois et il lui manquait terriblement, mais elle n'avait plus le droit de craquer, alors elle préférait l'ignorer, même si elle sentait son regard sur elle, elle n'avait pas le droit de tourner les yeux, préférant regarder devant elle.

Pas le temps de voir si elle allait résister encore longtemps puisque l'ascenseur venait de s'arrêter, les lumières s'étaient éteintes et Fantine avait eu le temps de se rattraper pour ne pas finir au sol. Pourquoi est-ce qu'il fallait que ça lui arrive maintenant ? Pourquoi quand elle se retrouvait seule avec Orion, n'ayant aucun moyen de fuir ? Elle n'avait donc aucune chance. « Non, pas maintenant. » Elle n'avait pas pu retenir cette phrase, même si elle ne l'avait pas prononcé très fort, le brun l'avait sans doute entendu. « Tu peux nous sortir de là ? » Ou allaient-ils devoir attendre que quelqu'un vienne les sortir d'ici ? Après tout, il était censé être doué avec tout cela, peut-être qu'il allait bien pouvoir faire quelque chose et Fantine n'avait pas envie de rester coincée ici une éternité.

« Non, pas maintenant. » Orion cligna plusieurs fois des yeux. Sérieusement ? Les premiers mots qui sortaient de ses lèvres, et c'était pour se plaindre ? Aucun doute sur le pourquoi du comment, elle était contrariée de se retrouver coincée avec l'une des seules personnes qu'elle ne voulait pas voir en ce moment. Le cœur d'Orion se serra un peu plus, la colère se diffusant dans tous les nerfs de son corps. C'était impressionnant à quelle rapidité elle avait changé de sentiments envers lui. Raison de plus pour essayer de faire redémarrer cet ascenseur le plus rapidement possible.
Le manque de lumière empêchait Orion de voir quoique ce soit. Il fallait qu'il aille vérifier la console de commande interne, mais Fantine se trouvait juste devant avant l’extinction des lumières, et il était hors de question qu'il se cogne à elle dans sa tentative d'accéder au terminal. « Tu peux nous sortir de là ? » sa voix résonna, se répercutant contre les parois métalliques. Il attendit un peu, laissant le silence prendre place. Puis les leds de secours s'allumèrent, les baignant dans une lumière rougeoyante douce et artificielle. Maintenant, il allait pouvoir voir ce qu'il faisait. Il passa devant Fantine, faisant bien attention à garder ses distances et à ne pas la toucher. En passant devant elle, il lui répondit froidement , un sourire forcé s'étalant sur ses lèvres :
« A vos ordres. »
Il sortit un tournevis de l'une de ses nombreuses poches, et le fit tournoyer avant de se mettre à dévisser la plaque de protection. Quelques secondes plus tard, il avait les mains dans les fils. Il pianota rapidement dessus, et un soupir d'énervement franchi ses lèvres.
« Bon. L'origine de la panne n'est pas accessible par l'ascenseur. »
Il pianota encore un peu, et une sonnerie retentit. Une voix grisaillée s'éleva autour d'eux, disant qu'ils étaient déjà au courant de ce qu'il était arrivé et qu'ils étaient sur le coup. Qu'ils n'avaient plus qu'à prendre leur mal en patience et qu'ils allaient faire le plus vite possible. Orion n'eut même pas le temps de demander s'il ne pouvait pas aider de là où il était qu'ils avaient déjà raccroché. Énervé, il claqua la plaque de protection contre le panneau, qui tomba avec bruit sur le sol de l'ascenseur.
Il se retourna et s'appuya dos contre la paroi. Son regard désabusé se posa sur le visage de Fantine. Il avait une furieuse envie de lui demander comment elle allait. Oui, même après des mois de silence radio et de preuves de désintérêt envers lui, il avait juste envie de savoir comment elle allait. Il ravala sa question avec fierté. Après tout, il lui avait promis qu'il ne la forcerait pas à lui parler, alors c'était exactement ce qu'il allait faire.

L’ascenseur venait de s’arrêter. Pourquoi maintenant ? Pourquoi quand Fantine était à l’intérieur et avec Orion en plus de cela ? Elle avait pris les ascenseurs des centaines de fois et jamais ils ne s’étaient arrêtés comme cela. La brune laissait échapper une phrase qui montrait son mécontentement. Elle aurait sans doute réagi autrement s’il y avait eu d’autres personnes dans ce fichu ascenseur. En plus de cela, ils étaient tous les deux plongés dans le noir et Fantine était incapable de savoir ce qu’elle devait faire pour sortir d’ici elle ne connaissait rien à tout cela, mais Orion lui devait bien savoir quoi faire. Alors la seule phrase qu’elle comptait lui adresser était pour lui demander de les faire sortir d’ici. Avant que le brun ne répondent, les lumières de secours s’étaient mises en route. À sa réponse, Fantine levait les yeux, tout en se poussant pour lui laisser la place, afin qu’il puisse atteindre les commandes de l’ascenseur. Fantine n’avait aucunement envie de le regarder, mais elle ne pouvait pas s’en empêcher. Elle le regardait faire en espérant qu’il trouve rapidement d’où venait la panne, mais surtout pour qu’il la répare rapidement. Mais les paroles d’Orion ne se voulaient pas rassurantes pour la brune. Apparemment, il ne pouvait rien faire d’ici, génial, elle devait donc attendre que d’autres puisse réparer. Avant même que Fantine ne puisse dire quoi que ce soit, une voix s’étaient fait entendre. Au moins, d’autres étaient au courant de la panne et étaient en train d’essayer de la réparer et ils promettaient de faire vite. Ils avaient plutôt intérêt. Orion s’énervait, ce n’était pas étonnant, Fantine s’énervait également, mais uniquement de l’intérieur. Elle avait envie de leur hurler de se dépêcher pour pouvoir sortir d’ici et se rendre là où elle devait être, c’est-à-dire loin d’Orion.

Le temps semblait interminable, Fantine essayait de ne pas regarder Orion, elle ne voulait pas croiser son regard. Elle avait également envie de rester silencieuse, mais le silence était des plus pesants. « Comment… Comment tu vas ? » Question plus que banale, mais Fantine ne savait pas du tout quoi lui dire. Ils ne s’étaient pas parlés depuis des mois et la situation était assez particulière. Si la situation ne l’obligeait pas, elle n’aurait pas eu à lui parler. Et puis dans le fond, elle avait véritablement envie de savoir comment il allait, elle avait également envie de savoir comment il vivait la séparation, en tout cas elle, elle le vivait vraiment très mal.

S'il y avait eu des mouches dans l'Arche - et dans l'ascenseur - on les aurait entendu voler, ça c'était certain. Orion, le regard fixé sur le bout de ses chaussures, se forçait à réfléchir à tout sauf au fait que Fantine se trouvait à quelques pas de lui. La panne. Il fallait qu'il réfléchisse à la panne. Peut-être avait-elle un rapport avec le court-circuit qui avait eu lieu dans le cabinet médical ? Mais il ne pouvait empêcher ses pensées de retourner vers l'odeur de Fantine, très légère mais si présente, lui qui ne l'avait vu d'aussi près depuis de si longs mois... Non, penser à autre chose, penser à autre chose...
« Comment… Comment tu vas ? » Orion haussa un sourcil, mais resta le regard planté droit devant lui. Ses pensées s'emballèrent. Plusieurs versions de lui-même lui murmuraient des réponses à l'oreille, et il ne savait pas laquelle lui apporter. Un éclat de sentiments où il lui dirait qu'il avait le cœur brisé et qu'il tentait vainement de retourner à sa vie d'avant ? Une réponse courte, fausse et froide, dictée par sa fierté, lui répondant que tout allait au mieux ? Ou une réponse mesquine et accusatrice lui demandant ce que cela pouvait bien lui faire (et cette version était bien entendu plus polie de celle qui lui avait traversé l'esprit). Ce fut finalement un mélange de tout qui sortit d'entre ses lèvres.
« Comme quelqu'un revenu brutalement à la réalité... » dit-il, une boule lui entravant la gorge. « Mais pas de soucis à se faire, je suis doué pour réparer ce qui est brisé. » ajouta t-il avec un large sourire forcé.
Ces derniers mots, il les avait dit de manière dure, les utilisant comme une attaque autant qu'un bouclier. Il parlait de son cœur bien entendu, mais il était hors de question que ses paroles soient plus claires et explicites. Il avait sa fierté à conserver tout de même.
Cependant il ne pouvait s'empêcher de plonger son regard dans celui de Fantine à la recherche d'une réaction. N'importe laquelle. Pourvu que cela signifie qu'elle ne restait pas totalement de marbre face à lui.
Il hésita alors à lui poser la question. A vrai dire, il ne savait pas s'il avait véritablement envie de savoir comment elle allait... Si ce n'était se rendre compte un peu plus encore que, retournée à sa vie centrée autour de son travail et au sein de son rang, tout était tellement mieux.

Le silence régnait dans l’ascenseur. Ce n’était sans doute pas facile ni pour l’un ni pour l’autre de lancer la conversation, ce n’était pas comme s’ils se parlaient encore régulièrement. Ces derniers mois, rien n’était plus pareil entre eux, leur séparation avait été brutale et Fantine avait littéralement changé du jour au lendemain, pour le protéger certes, mais lui n’en savait rien. Si Fantine était mal à l’aise, Orion n’était sans doute pas non plus très à l’aise, sans doute également en colère après la brune, parce qu’il n’avait jamais eu le droit à une conversation, elle l’évitait depuis des mois, l’ignorait, comme si leur histoire n’avait jamais eu lieu, pourtant elle avait été bien réelle pendant plus d’un an.

C’est Fantine qui a décidé de briser la glace, même s’ils avaient déjà échangé quelques mots depuis l’entrée de Fantine dans l’ascenseur. Ce n’était pas Fantine voulait lui parler, mais le silence était bien trop pesant et faire comme s’il n’était pas à quelques pas d’elle était impossible. Alors la brune avait sortie la première phrase qui lui passait par la tête afin de mettre fin à ce silence interminable et pesant. Et puis dans le fond, elle avait réellement envie de savoir comment il allait, même si elle doutait fort qu’il ne lui réponde sérieusement. Et même si Orion cherchait sans doute à se cacher derrière ses paroles, Fantine comprenait, elle comprenait que leur séparation avait également été douloureuse pour lui et qu’il essayait de s’en remettre et Fantine était bien placée pour savoir à quel point il était dur d’oublier une personne que l’on aimait. Quoi répondre à cela ? Fantine ne savait pas comment réagir et quand le regard d’Orion avait croisé le sien, elle avait immédiatement tourné les yeux. Mais la brune ne pouvait pas rester comme ça, elle devait de nouveau parler, pour s’excuser sans doute. C’était l’occasion parfaite pour le faire, personne ne pouvait entrer pour le moment, personne ne pouvait entendre qu’elle allait s’excuser sincèrement auprès de lui. Et puis elle se sentirait sans doute mieux après l’avoir fait, même si leur conversation n’allait pas plus loin, elle lui aurait présenté ses excuses, elle qui s’en voulait tellement de ne jamais avoir eu le cran de le faire. La brune ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortait, elle eu une légère hésitation, avant de regarder de nouveau Orion. « Je voulais m’excuser. Je suis sincèrement désolée pour tout ça Orion, je ne voulais pas te faire de mal. » Elle était plus que sincère avec lui, elle avait de toute façon beaucoup de mal à lui mentir, même si désormais elle devait le faire en montrant qu’elle ne ressentait plus rien pour lui alors que c’était bien loin de la vérité.

« Je voulais m’excuser. Je suis sincèrement désolée pour tout ça Orion, je ne voulais pas te faire de mal. » Orion déglutit avec difficulté. Il ne savait pas pourquoi mais ces quelques mots venaient de finir de lui écraser la poitrine. Désolée. Elle était désolée. Presque deux ans de relation et c'était tout ce qu'elle avait à dire ? Désolée pour "tout ça" : qu'est-ce que ça pouvait bien vouloir dire de toutes manières ? Qu'elle était désolée de l'avoir rencontré ? Désolée de l'avoir embrassé ? Désolée d'avoir entamé cette relation ? Ou désolée qu'il soit tombé amoureux comme un pauvre c*n, et qu'il y ai cru ? Merde ce qu'il avait pu être c*n. Les yeux brillants de colère, il ne pu s'empêcher de lui poser la question :
« Et désolée pour quoi exactement ? » il pencha légèrement la tête sur le côté « De m'avoir fait croire que nous c'était important ? Ou d'avoir attendu qu'on se fasse prendre pour te rendre compte que non ? ... Certainement pas de m'avoir ignoré pendant presque 3 mois en tous cas. »
Son ton était cassant. « Je ne voulais pas te faire de mal. » Et bien breaking news, c'était pourtant exactement ce qui s'était passé, elle aurait peut-être dû y penser avant. Orion émit un rire désabusé et amer. En fait, il en avait strictement rien à faire de ses excuses. C'était pas des excuses qui allaient arranger les choses, au contraire, il avait plutôt l'impression que ça ne faisait que remuer le couteau dans la plaie. Comme si le fait qu'elle soit désolée scellait le fait que c'était terminé, définitivement.
« Tes excuses tu peux te les garder. Tu veux te donner bonne conscience c'est ça ? Et bien je vais peut-être briser ta petite bulle rose de Supérieure, mais les actions ont des conséquences Fantine. »
Les battements de son cœur s'étaient accélérés du fait de l'énervement. Comme à son habitude lorsqu'il était énervé et stressé, sa main faisait tournoyer toute seule un outils - pour l'occasion le tournevis qu'il n'avait pas remis dans sa poche tout à l'heure.

Fantine s’excusait et voilà tout ce qu’elle récoltait : la colère d’Orion. Elle savait bien qu’elle aurait dû se taire, ne rien dire comme elle voulait faire au début, mais c’était tellement compliqué. Son regard, sa voix, ses paroles, tout blessait Fantine. Comment pouvait-il croire cela d’elle ? Il ne la connaissait donc pas ? Fantine était vraie, et elle n’avait jamais aussi sincère qu’avec lui. Elle ne lui avait jamais fait croire que leur couple était important, parce qu’il l’était. Elle se rendait compte qu’il était même plus qu’important à ses yeux depuis leur séparation. Elle s’en voulait de tout ça, elle s’en voulait de l’avoir ignoré, mais c’était pour son bien à lui, pour éviter qu’il ne lui arrive malheur. Devait-elle se reprocher de vouloir protéger l’homme qu’elle aimait. Si Fantine essayait de ravaler son mal-être en détournant le regard, en évitant de lui répondre, parce que ce qu’il venait de dire l’avait blessé, elle ne pouvait pas rester sans rien faire alors qu’il continuait. Il n’avait jamais été comme cela avec elle, mais leur relation n’avait jamais connu cela. Il allait lui en vouloir longtemps d’avoir pris la décision de mettre fin à leur histoire ? Si Ronan n’était pas intervenu, s’il n’avait pas été lâche en les dénonçant, jamais elle n’aurait mis fin à cette histoire. Les nouvelles paroles d’Orion étaient une nouvelle fois douloureuses, mais c’étaient les paroles d’un homme blessé. « J’hallucine… Je veux me donner bonne conscience ? Sérieusement ? » Fantine marquait une courte pause, elle n’avait pas envie de dire ce qu’il ne fallait pas, mais elle était blessée et s’il la détestait ce n’était peut-être pas plus mal, sans doute plus simple pour ne pas faire d’erreur à nouveau. « Tu sais quoi, tu as raison, je t’ai fait croire que nous deux, c’était important, mais ce n’est absolument pas vrai. Toi ou un autre, c’était la même chose en réalité. Après tout, un Inférieur reste un Inférieur, non ? Je me suis fichue de toi pendant presque deux ans, tu n’as jamais compté pour moi… Voilà, tu as eu ce que tu voulais entendre, c’est bon ? » Bien évidemment, Fantine mentait, mais Orion le cherchait. Fantine avait déjà entendu la même chose, beaucoup de Supérieurs lui avaient dit qu’Orion s’était amusé avec elle, un Inférieur qui arrive à séduire une Supérieure, ça devait bien rire quand il en parlait à ses proches. « Je pourrais dire la même chose de toi, Orion. Je pourrais dire que tu t’es amusé, que tu ne cherchais qu’à te moquer de la pauvre Supérieur qui tombe dans les bras d’un Inférieur. Ça a dû t’amuser aussi, non ? Nous ne sommes pas si différents alors ? » Fantine était en colère et blessée par les pensées de celui qu’elle aimait, elle se défendait comme elle le pouvait.

Et voilà qu'ils étaient deux à s'énerver. C'était assez ironique d'ailleurs ; en l'espace de quasiment deux ans, ils ne s'étaient jamais engueulés. Peut-être que le fait de se cacher avait eu pour effet finalement de les protéger du monde extérieur, voire d'eux-même. Et donc leur première dispute de couple était en fait une dispute de rupture... Les mots que Fantine lui lança à la figure ne firent qu'empirer les choses, et c'était comme si le fameux couteaux qui remuait la plaie s'enfonçait de plus en plus profondément, et était de plus en plus aiguisé. Car autant il avait bien compris que désormais il ne comptait plus, mais pourtant il s'était tout de même accroché au fait que ce qu'ils avaient vécu était vrai. Un écart naïf et pour s'amuser de la part de Fantine, mais tout de même vrai. C'est pour ça que lorsqu'elle lui balança qu'elle s'était fichue de lui pendant tout ce temps, il en eu le souffle coupé. Ses yeux devinrent humide. Non. Il n'allait pas verser une seule larme, il en était hors de question. Et puis d'ailleurs, ces mots avaient beau lui faire extrêmement mal, il ne pouvait s'empêcher de sentir que quelque chose clochait. Ses mots semblaient... presque creux. Sa voix avait été en même temps trop aigüe et trop forte pour avoir été honnête.
Orion fronça les sourcils. Il déglutit une nouvelle fois avec difficulté, chassant la douleur dans sa gorge qui menaçait de le faire craquer. Il avait également l'impression que cette phrase, elle l'avait surtout dit pour qu'il la laisse tranquille. Ses méninges se mirent en route, des dizaines de pensées contradictoires s'enchaînant les unes après les autres. Il fit alors un pas en avant, puis deux, se dirigeant vers elle. Il s'arrêta à quelques centimètres d'elle, jusqu'à ce qu'il puisse sentir son odeur, et plonger son regard dans le sien.
« Pourquoi tu mens ? » gronda t-il.
Mais sa réplique suivante l'étonna complètement. Elle ne pouvait pas être sérieuse. Non, on ne s'amusait pas à ça entre inférieurs, justement à cause de tous les problèmes que cela pouvait leur apporter. Car après tout, ce n'était pas les supérieurs qui risquaient du travail forcé, de l'emprisonnement, voire la mort ; non, c'était bel et bien eux, les inférieurs. Et mine de rien, ils avaient beau ne pas avoir les vies des plus confortables qui soient, il n'empêchait qu'ils y tenaient. Pour la grande majorité d'entre eux en tous cas. Orion se mit alors à rire, amer. Mais il ne souligna pas cette évidence, et se contenta de lui répondre :
« Sauf que c'est toi qui m'a fui et ignoré, et non l'inverse. Ne me fais pas passer pour ce que je ne suis pas. »
Car oui, il lui était arrivé d'avoir des relations sans incidence, pour s'amuser, ou même pour passer le temps parfois, mais il avait toujours été très clair sur ses intentions, et honnête. S'il avait ne serait-ce qu'une seule qualité, ce serait bien la franchise.

Les pensées d’Orion étaient très difficiles à entendre pour Fantine. Elle n’avait jamais menti avec lui, elle avait toujours été très sincère avec lui, elle avait risqué beaucoup de choses en l’aimant malgré les interdictions. Et aujourd’hui encore, elle mettait son amour pour lui de côté, elle s’effaçait pour ne pas qu’il arrive malheur à l’homme qu’elle aimait. Et lui osait lui reprochait d’avoir fait semblant pendant presque deux ans. Il n’avait pas le droit de penser cela, il n’en avait pas le droit parce qu’il ne devait pas douter de l’amour de Fantine pour lui, jamais. Mais puisqu’il semblait vouloir l’entendre de la bouche de Fantine, alors elle allait lui dire. Elle confirmait qu’elle n’avait jamais rien ressenti pour lui, qu’elle s’était moqué de lui depuis tout ce temps. Rien n’était vrai, mais puisqu’il voulait l’entendre. Les paroles de la brune semblaient être douloureuses à entendre pour Orion, mais il l’avait cherché. Après avoir laissé quelques secondes de silences, le brun s’était approché de Fantine, il était désormais trop proche d’elle, à tel point que les battements de cœur de Fantine s’accéléraient. Il avait compris qu’elle mentait, elle s’était elle-même trahi en ne réussissant pas à mentir comme il fallait. Pourtant, elle ne répondait pas, elle ne voulait pas répondre, parce qu’elle se trahirait sur ses sentiments actuels et elle ne devait pas le faire.

Fantine reprit rapidement la parole pour lui retourner les accusations. Elle avait déjà entendu tant de fois qu’Orion s’était fichue d’elle, mais jamais elle n’y avait cru. Pour de nombreux Supérieurs, les Inférieurs étaient coupables de tout et de n’importe quoi. Pour le coup, Fantine allait se servir de cette accusation pour se défendre, même si dans le fond, elle savait que ce n’était pas fondé, Orion risqué bien trop pour s’amuser à cela. « Je ne t’ai ni fui, ni ignoré Orion. Nous n’avions pas le droit d’être ensemble. Nous nous sommes fait prendre, alors forcément, ça a mit fin à notre histoire. » Quoi dire de plus ? N’était-il pas normal d’arrêter leur histoire ? Ils s’étaient fait prendre, ils avaient tous les deux eu un avertissement, s’ils étaient restés ensemble, qu’ils s’étaient de nouveau fait prendre Orion aurait risqué beaucoup plus qu’un simple avertissement. Alors auraient-ils pu continuer ? La réponse était pourtant claire, non, ils n’auraient pas pu. « Qu’aurions-nous dû faire d’après toi Orion ? » Il n’y avait pas beaucoup de solutions. Fantine devait lui faire comprendre qu’elle avait fait cela, parce qu’elle n’avait pas eu d’autre choix.

Malgré sa question, Fantine n'avait pas répondu. Orion soupira. Tellement de choses avaient changé. Avant ils pouvaient se dire tout et n'importe quoi. Désormais, il avait l'impression qu'ils étaient des étrangers. Il avait envie de la pousser, de la titiller jusqu'à la faire craquer pour qu'elle lui avoue toute la vérité, quelle qu'elle soit. Mais il décida de n'en rien faire. Après tout, il lui avait promis qu'il n'allait pas la forcer à lui parler. Peut-être avait-elle dit tout cela juste pour lui faire du mal... il en doutait car il la connaissait et ce n'était pas son genre. Mais qui sait... Peut-être s'était-il trompé sur toute la ligne ? La douleur vous faisait tout remettre en question. En tous cas il ne pourrait s'empêcher, les prochains jours, de se répéter cette phrase si cruelle encore et encore dans sa tête, essayant vainement de donner sens à tout ça.
Il ferma les yeux quelques instant, profitant une dernière fois d'être aussi proche d'elle, puis il s'écarta tout en l'accusant de l'avoir fui et ignoré. Il resta cependant moins loin qu'il ne l'avait été juste avant, et se contenta de s'appuyer dos à la paroi, juste à côté du terminal. Qui sait, peut-être allait-on avoir besoin de lui finalement. Mais non, la voix de tout à l'heure ne se fit pas entendre. Par contre Fantine, elle, lui répondit.
Orion ne put s'empêcher de hausser les sourcils.
« Et donc je ne méritais pas même une dernière discussion ? Être ensemble, ça, ne t'inquiète pas, j'ai bien compris qu'on ne pouvait pas. Mais une discussion entre deux citoyens de l'Arche, même de rang différent, ça n'est pas encore interdit que je sache. »
Cela sonnait comme un reproche, et c'en était tout à fait un. La colère faisait danser des flammes dans les yeux d'Orion, flammes qui étaient également alimentées par la douleur et la frustration.
« Qu’aurions-nous dû faire d’après toi Orion ? » Ces paroles semblèrent résonner autour d'eux. L'invitant à l'hypothèse, à enchaîner les si et lui faisant miroiter d'autres solutions. D'autres solutions qui, à vrai dire, avaient eu le temps de s'imposer à son esprit pendant ces derniers mois. Tout d'abord qu'elle renonce au rang de Supérieur. Mais ça, il ne le voulait pour rien au monde. Il ne voulait pas lui infliger ce que lui vivait au quotidien : la frustration de ne pas pouvoir faire mieux, de ne jamais pouvoir atteindre son véritable potentiel... Il ne voulait absolument pas ça pour elle. Elle était brillante, et méritait un avenir radieux. A vrai dire la seule solution qu'il avait trouvé était d'être plus prudents qu'avant. Bien plus prudents. Il la regarda alors droit dans les yeux, des flammes brillant toujours au fonds de ses pupilles.
« Être plus prudents. » un ange passa « Et qui sait, les règles ne seront peut-être pas toujours les mêmes... »
Cette dernière idée, il l'avait retourné maintes et maintes fois dans sa tête. Car oui, bientôt ils seraient sur la nouvelle planète. Et qui dit nouvelle planète dit nouveau départ, non ? Tout espoir était permis...
« Mais de toutes manières, pour toi ça n'en vaut pas la peine, n'est-ce pas ? »
Ou en tous cas c'était ce que son comportement lui avait fait comprendre. Que prendre de tels risques pour être avec lui, c'était hors de question.

Orion semblait ne pas vouloir comprendre ce qui avait poussé Fantine à prendre ses distances. Elle aurait aussi aimé avoir cette dernière discussion, elle s’en voulait d’ailleurs de ne pas l’avoir eu. Elle aurait aimé avoir la force d’aller le trouver et de lui dire que tout était terminé. Malheureusement, elle n’en avait pas eu le courage. L’affronter, mettre fin à leur relation était bien trop dure pour elle. Elle était certaine que l’éloignement était le mieux. Fantine pensait qu’être loin de lui, que de ne plus lui parler, ne plus le croiser faisait office de dernière conversation, mais cela semblait ne pas suffire pour Orion. « Non, ce n’est pas interdit, mais… D’accord, nous aurions peut-être dû avoir cette conversation » Si elle avait eu cette conversation avec lui, elle n’aurait peut-être jamais eu la force de mettre fin à leur histoire. Alors oui, elle avait fui. C’était la seule solution. Et puis de toutes façons, cette dernière conversation n’aurait rien changé, sauf qu’Orion aurait tout de suite était fixé concernant les intentions de Fantine. « Être plus prudent n’aurait pas été suffisant, nous aurions été encore plus surveillé. Et aucune règle ne changera, les Supérieurs ne sont pas prêts à laisser les lois changer. Crois-moi, être plus prudents n’aurait pas suffit. » Fantine avait demandé à Orion ce qu’ils auraient pu faire d’autre, mais la vraie réponse était rien, ils n’auraient rien pu faire d’autre. Leur relation n’était plus secrète, ils auraient été surveillés, suivis et beaucoup de Supérieurs n’auraient pas hésité à les dénoncer à la première occasion. Le seul vrai moyen était que Fantine quitte son rang, qu’elle rejoigne les Inférieurs, mais elle ne pouvait pas le faire, elle ne pouvait pas parce qu’elle pensait à ses parents, à son travail, à ses privilèges, ces pensées étaient peut-être égoïstes, mais elle ne pouvait pas les effacer, elle n’y arrivait pas. « Tu ne comprends donc rien. Je pensais que tu me connaissais assez pour comprendre pourquoi j’avais fait ça. Je n’ai pas fait en sorte de ne plus te croiser juste par plaisir de le faire, je l’ai fait parce que c’était nécessaire. Penses ce que tu veux, mais j’ai souffert de notre séparation et ce n’est toujours pas simple aujourd’hui. Tu sais très bien ce que tu risquais si nous nous faisions prendre à nouveau, je n’avais pas le droit de te mettre en danger une nouvelle fois. Alors oui, j’ai pris la décision de mettre fin à notre histoire sans même prendre la peine de venir t’en parler avant, mais il faut me comprendre, je n’ai pas fait ça pour moi, mais j’ai fait ça pour te protéger toi. Alors tu peux être déçu, tu peux être ce que tu veux, mais s’il te plaît, ne vient pas me reprocher ça. » Si Fantine n’avait pas envie de lui avouer tout cela, elle avait échoué. La brune avait beaucoup de mal à garder les choses pour elle parfois et quand il s’agissait d’Orion, elle avait beaucoup de mal à ne pas lui dire ce qu’elle avait sur le cœur, surtout quand il pensait ça d’elle. Si elle disait vouloir qu’il la déteste pour que tout soit plus simple, la vérité était qu’elle ne le supporterait pas. Fantine fixait Orion, ne baissant pas une seule seconde le regard, elle ne mentait pas et il devait le savoir, elle avait fait tout ça pour lui.

La tête haute, les lèvres serrées, Orion l'écouta dire qu'il aurait effectivement du avoir droit à une explication. Étrangement, lui qui en temps normal adorait entendre les autres aller finalement dans son sens ; cette fois-ci il n'en éprouva aucun sentiment de contentement. Sa main se remit à joure avec le tournevis lorsqu'elle lui expliqua pourquoi selon elle être plus prudent n'aurait pas suffit. Ses mâchoires se remirent à se contracter par intermittence. Lui pensait que si. Depuis son plus jeune âge il s'amusait à contourner les règles en tous genres ; il savait ce qu'il fallait faire et ne pas faire, même sous surveillance. Mais Fantine non. Et voulait-il vraiment l'entraîner dans ce genre de vie semi-clandestine ? Non, elle méritait mieux. Il se contenta donc de rester muet, son visage ne trahissant aucune émotion. Plus que jamais, il avait l'impression qu'elle s'éloignait, que leur histoire, se faufilait entre ses doigts, et que plus il s'y accrocherait pour la retenir, plus elle disparaîtrait rapidement. Il ne put cependant s'empêcher de répondre froidement :
« Les Supérieurs ne seront peut-être pas toujours aux commandes. »
Car effectivement si l'on écoutait les rumeurs qui se propageaient telle une traînée de poudre dans l'Arche, la Résistance se développait de plus en plus. Orion, trop occupé qu'il avait toujours été avec son travail et le fait de prendre soin de sa tante, n'avait jamais pris le temps ni la peine de réfléchir à tout ce qu'il se passait à ce niveau là. Mais soudainement, la perspective d'un changement de régime lui paraissait plutôt attirante.
D'autant plus que les paroles qui suivirent redonnèrent une once d'espoir à Orion. Son cœur s'emballa. Elle l'avait donc fui pour le protéger ?
« Et tu pensais que ça allait suffire ? »
L'Arche avait beau être grande, elle n'aurait pas pu l'éviter ad vitam aeternam, la preuve en cet instant même. Et puis en un sens, ça aurait été également mal le connaître. Il se rapprocha à nouveau d'elle, se retrouvant séparés de quelques centimètres seulement. Il approcha doucement sa main droite pour la déposer délicatement sur la joue de Fantine, plongeant son regard dans le sien.
« Si c'est moi qui encourt le danger, c'est à moi de prendre la décision de me protéger... ou non. »
Son cœur battait désormais très fort dans sa poitrine. Plongé dans les yeux d'un marron profond de Fantine, il ne savait pas quelle allait être sa réaction. Il avait douloureusement envie de rompre cette distance de quelques centimètres et de l'embrasser. Mais il allait se contenter d'attendre. Il voulait savoir quelle allait être la décision finale de Fantine.

Les lois de l’Arche, c’était ça qui les empêchait de s’aimer. Et rien ne changerait jamais. Fantine l’avait tant espérait et l’espérait encore, mais en réalité, il y n’y avait qu’une infime chance pour que cela puisse arriver un jour. Il ne fallait pas compter dessus pour pouvoir avoir une perspective d’avenir différente. Orion pensait le contraire et il en avait le droit. Il y avait de quoi espérait, avec toutes ces histoires de résistances, mais les gouverneurs faisaient tout leur possible pour y mettre fin définitivement. S’ils commençaient à perdre le moindre petit pouvoir, ils agiraient de façon plus stricte et plus violente sans doute et jamais les Résistants ne réussiraient à changer les choses, au plus grand désespoir de certains. La seule réponse de Fantine était de lever les yeux. Ils ne pouvaient pas continuer une histoire clandestine, avec pour seul espoir que les lois changent un jour. Même si cela devait arriver un jour, il fallait rester discrets jusque-là et ça allait désormais être compliqué.

Orion continuait les reproches, injustes selon Fantine. Si la brune n’avait pas envie de se dévoiler une fois de plus, elle n’avait pas envie d’entendre ce genre de parole de la bouche d’Orion. Elle en avait entendu des choses depuis que leur histoire avait été découverte, des choses parfois très douloureuse à entendre, ça faisait mal, mais généralement elle s’en fichait parce qu’elle ne tenait pas aux personnes. Là, il s’agissait d’Orion, elle tenait bien trop à lui pour accepter qu’il puisse penser ce genre de chose de Fantine. « Oui, je le pensais, je l’espérais en tout cas. » Naïvement, Fantine pensait vraiment pouvoir éviter Orion. Elle faisait tout pour ne jamais le croiser et jusque-là, ça avait très bien fonctionné. Si elle avait fait demi-tour en le voyant dans cet ascenseur, elle n’aurait pas eu besoin d’avoir cette conversation et elle l’aurait sans doute encore évité un temps. Pourtant, il avait raison, elle n’allait pas pouvoir l’éviter à vie, mais peut-être qu’avec le temps, ils auraient fini, chacun de leur côté, à oublier l’autre et à faire une croix sur leur histoire. Orion se rapprochait de Fantine, arrivant bien trop proche de la brune, quelques centimètres à peine les séparés. Le cœur de Fantine s’accélérait de nouveau, comme à chaque fois qu’Orion se trouvait près d’elle. Il déposait sa main sur la joue de Fantine et la regardait droit dans les yeux. Les mains de Fantine auraient aussi voulu trouver le contact, mais elle les gardait loin de lui. Elle aurait voulu fuir, mais elle ne pouvait pas, parce qu’ils étaient tous les deux coincés dans ce fichu ascenseur. « Je ne pourrais pas supporter le fait de te savoir en danger encore une fois. » Même si Fantine avait envie de l’embrasser, elle n’avait pas le droit de le faire, parce qu’elle savait très bien ce que cela voulait dire. La Supérieure détournait les yeux, regardant ailleurs pour ne pas faire ce qu’elle s’interdisait depuis des mois. « On n’a pas le droit Orion. » En prononçant ces mots Fantine espérait plus se convaincre, malgré tout, elle n’avait pas envie de s’éloigner, elle n’avait pas non plus envie qu’Orion ne s’éloigne d’elle. Si seulement l’ascenseur pouvait se remettre en marche rapidement, ça l’arrangerait bien, parce qu’elle n’aurait pas d’autre choix que de reprendre ses distances à nouveau.

Lorsque Fantine lui répondit qu'elle ne supporterait pas de le savoir en danger encore une fois, un sourire triste se dessina sur ses lèvres. Elle détourna alors les yeux. Il comprenait tout à fait sa réaction, mais se dire qu'il ne pourrait jamais faire ne serait-ce que la toucher, cela lui semblait impensable.  
« Et moi je ne pourrais pas supporter de ne plus te voir. » lui souffla t-il.
« On n’a pas le droit Orion. » Ajouta t-elle alors. Mais ses paroles semblaient contredire ses actes, car elle ne le repoussait pas non plus. La main droite d'Orion descendit vers son cou en un doux effleurement, son pouce restant caresser doucement sa joue tandis que ses autres doigts venaient enserrer sa nuque. Il voulait qu'elle le regarde à nouveau.
« Fantine... » appela t-il, sa voix ne se faisant plus que murmure.
Son cœur battait de plus en plus rapidement, jusqu'au moment où Orion prit sa décision, et son cœur rata alors un battement. Il rangea son tournevis dans sa poche afin d'avoir la main gauche de nouveau libre. Il posa alors sa main gauche sur la taille de Fantine et réduit l'espace entre leurs deux corps à néant. Puis, il déposa ses lèvres sur les siennes. Son baiser fut d'abord une question, pour se muer ensuite en une affirmation. Son cœur battait la chamade, et c'était une explosion de sensations qui traversaient son corps. Un mélange de désir et de besoin de douceur, de s'approprier Fantine tout en lui demandant la permission.
"Ici l'équipe d'intervention, est-ce que vous nous entendez ?"
Orion émit un léger grognement de contrariété. Sérieusement, c'était ce moment là qu'ils choisissaient ? Ses lèvres quittèrent celles de Fantine avec regret, mais il resta contre elle, refusant de reprendre de la distance. Sa main droite quitta la nuque de la belle brune pour voler vers la console et appuyer sur le bouton de communication.
« On vous entend. »
"Nous avions un technicien en route vers le cabinet médical et il n'y est toujours pas arrivé... Est-ce que Orion Blackburn serait parmi vous par hasard ?"
« C'est lui-même. »
"Ah très bien. Technicien Blackburn, il semblerait qu'une partie de la panne provienne de la cage de l'ascenseur, à exactement 6 mètres au dessus de vous. Il faudrait que vous alliez jeter un œil." Orion soupira.
« Très bien j'y vais. »
Il baissa les yeux vers Fantine et se sépara d'elle à contre-cœur. Il alla pianoter de nouveau sur la console, ce qui enclencha le mécanisme de sortie des barreaux permettant l'accès au toit. Il se dirigea vers le fonds de l'ascenseur et grimpa jusqu'en haut. Il mit quelques secondes à ouvrir la trappe qui allait le mener à la cage, où il se hissa rapidement. Les bruits retentissaient en écho dans ce qui ressemblait à un tunnel sans fin. Quelques LEDs permettaient de voir le long de l'échelle qui semblait continuer sur des centaines et des centaines de mètres. Il monta à l'échelle et trouva rapidement l'endroit dont les autres techniciens avaient parlé. Une résistance avait grillé. Il n'avait pas l'élément pour le changer sur lui mais réussi à bricoler quelque chose.
Quelques minutes plus tard, il atterrissait sur le sol de l'ascenseur pour annoncer que la réparation était faite. Il ne savait pas encore s'ils allaient repartir aussitôt. Son regard se posa de nouveau sur Fantine.

Leur relation était impossible, tout simplement. Pourquoi chercher à braver les interdits alors qu’il y aurait de graves conséquences ? Fantine l’avait compris lorsqu’on les avait dénoncés. Elle refusait de le mettre en danger, elle tenait bien trop à lui pour lui faire risquer quoi que ce soit une fois de plus. Pourtant, Orion ne semblait pas du même avis. Il disait ne pas pouvoir supporter de ne plus la voir, même si ces mots étaient agréables à entendre, même s’ils faisaient battre le cœur de Fantine encore plus vite, ça ne devait rien changer. Ils n’avaient pas le droit d’avoir une relation, il n’avait pas le droit de céder une fois de plus. Pourtant, Fantine était incapable de s’éloigner d’Orion, elle n’en avait pas la force. Quand Orion prononça son prénom, elle ne put s’empêcher de le regarder. Le brun venait de poser son autre main sur la taille de Fantine, avant de faire en sorte qu’il n’y ai plus aucune distance entre eux. Fantine aurait voulu avoir le courage de le repousser, elle savait que ce qu’ils s’apprêtaient à faire était une erreur, mais elle en avait autant envie que lui, alors quand Orion avait commencé à l’embrasser, elle ne put que lui rendre son baiser, déposant une main derrière sa tête. Si Fantine profitait de cet instant, mille choses étaient en train de se bousculer dans sa tête, mais elle n’avait plus envie d’être raisonnable, pas pour le moment. Elle s’était dit tellement de fois que ce genre de moment avec Orion n’arriverait plus jamais et pourtant…. Une voix était venue gâcher ce moment, même si Fantine aurait préféré qu’il ne s’arrête jamais. Orion n’avait pas l’air plus ravi de les entendre, ce qui fit sourire la jeune femme. Depuis le début de la panne, elle avait eu envie de les entendre pour qu’ils puissent sortir et maintenant qu’elle n’avait absolument plus envie de les entendre, ils se manifestaient. Malgré tout Orion restait tout contre la brune qui ne le lâchait pas du regard. Pourtant, ils allaient devoir se séparer puisque l’équipe technique venait de lui demander d’aller voir quelque chose au-dessus de là où ils se trouvaient, ils n’avaient pas d’autres choix que d’aller voir. Orion s’était séparé de la brune pour aller sur la console, avant de monter sur le toit. « Fais attention. » C’était peut-être idiot, il avait sans doute l’habitude, mais un accident était vite arrivé. Pendant qu’Orion s’occupait de la panne, Fantine faisait les cent pas. Elle savait que ce baiser n’était pas sans conséquence, elle ne pouvait plus faire marche arrière, elle ne pouvait pas faire comme avant, l’abandonner une nouvelle fois. Elle ne savait même pas si elle accepterait d’être de nouveau loin de lui. Tout se bousculait dans sa tête. Devait-elle être raisonnable ou devait-elle écouter son cœur ? Un choix compliqué à faire, mais elle n’avait pas le temps d’y réfléchir plus puisqu’Orion venait de redescendre, il annonçait qu’il avait fait ce qu’il fallait avant de regarder de nouveau Fantine. « On dirait qu’on va bientôt pouvoir sortir d’ici. » La brune se forçait à sourire, mais en réalité, elle aurait préférait que ce moment dur encore, malheureusement, elle allait devoir vite revenir à la réalité. « Je suis désolée. » Même s’il semblait ne pas ou ne plus lui en vouloir, elle avait besoin de le dire, parce qu’elle s’en voulait de l’avoir fait souffrir pendant si longtemps, même si c’était pour son bien.

Orion réfléchissait à la panne qu'il y avait eu : si les autres avaient trouvé l'origine d'une panne secondaire, c'est qu'ils avaient réparé la 1ère et que ça n'avait toujours pas fonctionné. Ils avaient alors envoyé des signaux électriques et avec les capteurs, avaient localisé l'endroit. Maintenant qu'il avait réparé ça (avec un bricolage de fortune, certes, mais il l'avait réparé quand même, pour l'instant en tous cas), il allait leur falloir lancer de nouveaux signaux électriques dans le système afin de vérifier que tout allait bien. Cela n'allait certainement pas leur prendre très longtemps. Il acquiesça donc à la remarque de Fantine. Effectivement, ils allaient bientôt pouvoir partir d'ici oui... Il se dirigea vers la console et appuya sur le bouton de communication.
« Ici Blackburn, réparation effectuée. Y a t-il d'autres soucis ? »
Il attendit de longues secondes, et la même voix que tout à l'heure lui répondit :
"Non tout est bon, vous pouvez sécuriser l'accès."
Il retourna alors vers le fonds de l'ascenseur et grimpa aux barreaux. Il revissa la plaque d'accès, redescendit, et appuya sur le bouton qui permettait aux barreaux de réintégrer le mur qui retrouva son aspect lisse et sans aucune aspérité.
« Je suis désolée. » Orion se retourna vers elle et avança. Il fit quelques pas et se retrouva à nouveau assez proche d'elle pour que son cœur s'emballe. Il leva main droite pour lui caresser la joue du bout du pouce ; partant de la pommette pour descendre lentement. D'abord le long de la joue, puis il laissa errer son pouce le long de la mâchoire, pour descendre ensuite lentement le long de son cou, et arriver sur la clavicule. Il avait toujours particulièrement aimé cette partie de son corps, et lors de leur nuits ensemble, ses lèvres se retrouvaient souvent à errer à cet endroit là en particulier.
« Je sais. » dit-il doucement.
C'est à ce moment que l'ascenseur s'ébranla. Il réfléchit rapidement. Étant donné le temps qui s'était écoulé avant que l'ascenseur ne tombe en panne, ils allaient arriver au cabinet médical dans à peine une minute. Il se rapprocha encore un peu plus de Fantine :
« Rejoins-moi dans 3 jours, à 23h, dans l'amphithéâtre de l'école. S'il te plaît. »
Et il l'embrassa avec fougue, en un baiser qu'il espérait ne serait pas le dernier.

Fantine n’avait pas pu s’empêcher de s’excuser pour tout ce qu’elle avait fait ces derniers mois, mais aussi pour tout ce qu’elle n’avait pas fait. Elle s’en voulait pour de nombreuses choses et tout cela la rongeait terriblement. Mais Orion avait toujours eu le don de la calmer, de la rassurer, très exactement comme il était en train de le faire en ce moment même. Le brun s’était de nouveau approchait d’elle déposant de nouveau sa main sur le visage de Fantine, la brune avait instinctivement fermé les yeux pour profiter de chaque seconde de ce moment. Les paroles d’Orion et sa façon de les prononcer ne faisait que la rassurer un peu plus. Si elle pouvait revenir en arrière, elle ferait les choses autrement. Dans un premier temps, elle ne ferait plus la sottise de parler à Ronan, ainsi elle n’aurait jamais eu besoin de s’éloigner d’Orion, elle n’aurait jamais eu à le faire souffrir et elle n’aurait jamais eu à souffrir elle-même. Leur moment de retrouvailles allait bientôt prendre fin puisque l’ascenseur venait de se remettre en route.

Orion se rapprochait un peu plus encore de Fantine, lui demandant de venir le rejoindre dans quelques jours. Avant que Fantine puisse répondre quoi que ce soit, le brun avait approché son visage de la brune afin de l’embrasser une nouvelle fois. « Je serais là. » Pourquoi avait-elle dit ça ? Elle ne savait même pas si elle allait y aller. En trois jours, elle avait largement le temps de réfléchir, le temps de comprendre ses erreurs et de se convaincre que ce qu’elle faisait n’était pas correct. Alors bien évidemment, elle avait envie de le retrouver, mais ce n’était peut-être pas une bonne idée. Avant que l’ascenseur n’arrive à destination, Fantine s’était éloignée d’Orion, même si l’envie n’y était pas. Elle essayait d’effacer le sourire qui trônait sur son visage, elle ne devait rien laisser paraître. Quand l’ascenseur s’était arrêté, Fantine regardait Orion descendre et elle lâcha un soupir sans même s’en rendre compte. Elle avait l’impression que tout ce qu’elle venait de vivre ne s’était pas réellement produit. En tout cas, Fantine devait redescendre de son petit nuage, parce qu’elle allait elle aussi devoir bientôt descendre et reprendre son travail et pour cela, elle avait besoin d’être concentrée et personne ne devait hanter ses pensées.

Son cœur avait explosé de joie lorsqu'elle lui avait répondu qu'elle serait là, et il voulut profiter de ces derniers instants jusqu'au bout. Car les trois prochains jours allaient certainement lui paraître durer une éternité.
Orion rompit le baiser seulement quelques secondes avant l'ouverture des portes. A peine leurs lèvres s'étaient-elles séparées qu'ils avaient repris une bonne distance entre eux ; et le jeune homme affichait désormais un masque complètement neutre. Mais intérieurement, il souriait, voire même, il rayonnait.
Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent en grand, la voix robotique annonçant le cabinet médical. Orion sortit alors, se retrouvant dans l'entrée. Malgré son envie, il ne se retourna pas et avança droit devant lui en direction du bureau d'accueil afin de se faire annoncer puis mener jusqu'au lieu de la panne à réparer.
Pour sûr qu'Orion allait passer une très, très bonne journée, et il avait déjà hâte à se retrouver trois jours plus tard.