Des fouilles, encore et toujours + Alec.

Ronan ne se sentait pas bien à l'idée de reprendre son service. Il s'en rendait presque malade, mais il savait qu'il n'avait pas le choix. Après avoir passé une partie de la fin de la journée à stresser, il avait enfilé sa tenue de milicien et avait quitté son appartement. Il ne se sentait bien nul part. Ni chez lui, ni au travail. Si seulement avec Emma tout était comme avant, s'ils étaient heureux, peut-être que supporter son travail serait moins difficile. Le chemin jusqu'au poste de milice lui semblait si rapide. Il n'avait aucune envie de retrouver ses collègues, aucune envie de voir leurs regards. Il serait certainement jugé, on parlerait certainement discrètement sur lui, en lui jetant regard sur regard. Une bonne partie des miliciens devait être au courant maintenant, son nom et celui de son épouse inscrits sur la liste des potentiels rebelles. Il ignorait encore combien de temps il aurait le droit de travailler, après tout, on ne laisserait certainement pas un résistant continuer son travail dans la milice.

Lorsqu'il avait franchi le seuil du poste des miliciens, il n'avait pas perdu de temps et s'était directement renseigné sur son affectation. Comme par hasard, même si en réalité, il n'en était pas vraiment étonné, il était encore affecté à la fouille des appartements des Inférieurs. Combien de temps allait-il devoir subir ça ? Fouiller ses semblables, victimes, comme lui, pour la plupart. Néanmoins, il accepta sans broncher, n'essayant même pas de négocier. Il savait que c'était peine perdue.

Au bout de quelques minutes, l'équipe avait qui il devait travailler était formée et prête à partir. En plus de Ronan, deux miliciens et un militaire. Si les deux miliciens n'avaient pas participé à la fouille d'hier, le militaire, oui. Alec. Ronan avait déjà travaillé avec lui de temps en temps. Autrefois, il l'appréciait en tant que collègue, désormais il le haïssait. Comme Ronan devait certainement être détesté par tous ceux qu'ils avaient fouillé, rien de plus normal. A côté d'Alec, Ronan resta silencieux un temps tout en marchant dans les longs couloirs les menant aux appartements. Alec était un Supérieur et celui qui avait le plus haut rang des quatre. Aucun chef de la milice, pas de supérieurs. Alors forcément, il devait connaître les appartements qui seraient visités cette nuit-là. Prenant son courage à deux mains, froid, il lança au Supérieur : « Si je dois encore être humilié par vos fouilles chez moi, j'aimerai autant être prévenu dès maintenant ! » Il n'avait rien à exiger, rien à demander, mais il voulait savoir. Il avait besoin de savoir, de se préparer.

Et oui, le travail de militaire sur l'arche n'est pas toujours de tout repos. Alec en a marre de toujours devoir faire des perquisitions surtout qu'en plus la plupart du temps elles ne donnent rien. Et puis devoir déposer de fausses preuves ce n'est non plus ce qu'il aime le plus faire, mais il n'a pas le choix. Il a une couverture à faire tenir alors il doit faire ce qu'on lui demande même si cela ne l'enchante pas.
Et puis aujourd'hui il bosse à nouveau avec Crawley, ce pauvre type a qui été humilié bon nombre de fois depuis que son épouse à été emprisonnée. Alec ne sait pas s'il doit le plaindre ou au contraire le descendre. Il fut un temps où il l'appréciait mais depuis quelques temps le type ne fait que dénoncer, dénoncer, comme si c'était une fatalité et comme si sa survie en dépendait. C'est peu être bien le cas, c'est possible mais Alec pense qu'il y a des limites.

Alors comme à son habitude, il prend sa place, la liste des quartiers à aller visiter et il suit le mouvement tout en restant à sa place, prenant celle d'un militaire ou d'un supérieur quand il le faut.
Et puis voilà que Crawley prend la parole pour se plaindre visiblement puisque c'est à lui qu'il s'adresse. Alec le regard, prenant son air le plus détaché possible et lui répond.

"- Tu crois sérieusement qu'on va te prévenir, toi ou tes semblables quand on doit faire une perquisition ? Vous êtes tous traité de la même manière, sinon à quoi bon faire une perquisition surprise si on vous préviens avant.."

Alec hausse les yeux quelques secondes l'air de dire qu'il est pas bien lui à poser de telles questions. S'ils préviennent comment ils font pour trouver des rebelles ou des choses cachés ? c'est dingue d'imaginer qu'il puisse penser ça quand même. Bon, c'est sur que quand il sait qu'un rebelle de sa connaissance risque gros Alec fait son possible pour minimiser tout ça mais pour Crawley jusqu'à présent son seul tors c'est d'avoir une femme adultère.

Ronan n'avait qu'une hâte, que cette nuit se termine. Il avait hâte d'être affecté à autre chose. Il regrettait presque le travail du bureau, à recueillir les plaintes, alors qu'il détestait ça. Il savait que la nuit allait être terrible, à fouiller dans l'intimité des appartements, détruisant la vie de certains Inférieurs s'ils trouvaient des preuves. Contrairement à lui, qui avait eu de la chance quelque part puisque la fouille de son appartement avait eu lieu après le départ d'Arthur, là ils s'apprêtaient à fouiller en pleine nuit, avec des enfants présents.

Ronan avance silencieusement dans un premier temps, puis il finit par prendre son courage pour demander au Supérieur à ses côtés s'ils doivent visiter l'appartement de Ronan, encore une fois. Ils l'avaient déjà fait la nuit dernière, mais il savait la pression qu'était capable de mettre les miliciens en venant encore et encore jusqu'à ce que l'on cède. Il connaissait bien leurs manières, après tout, il était comme eux bien souvent, même si c'était malgré lui. Alors, il demande, il demande parce qu'il veut être au courant. Sans grand étonnement, il n'obtient pas de véritable réponse. Juste une petite attaque. Ses semblables ? Il était un être humain avant d'être un Inférieur ou un potentiel rebelle, pourquoi était-ce si difficile à comprendre ? « Je ne risque pas de courir chez moi pour cacher des preuves... Vous ne me lâcherez pas... » Ose-t-il poursuivre plutôt que de la fermer et d'avancer en silence. Alec ne risquait rien à lui dire la vérité. Ronan ne risquait pas de s'enfuir pour cacher une quelconque preuve. « Il n'y a aucun risque à me dire la vérité ! On travaille ensemble, c'est en demander trop que de recevoir un minimum de respect ? » Du respect ? Demander cela à un Supérieur n'était peut-être pas la meilleure chose à faire. Ils travaillaient ensemble, mais n'avaient pas le même boulot, ni même le même rang et certains ne se gênaient pas pour le dire. Mais tout ce qu'il voulait, c'est être respecté et prévenu pour se préparer, s'il était possible de se préparer à ça.

Alec aurait aimé que le milicien accepte son sort et passe à autre chose parce que la vie continuait et heureusement d'ailleurs, sinon beaucoup d'entre eux se seraient déjà donné la mort. Cette vie dans cet univers confiné n'avait rien d'extraordinaire, bien des gens seraient devenu dingue dans d'autres circonstances et pouvait même se demander si ce n'était pas déjà le cas pour certain d'entre eux.

"- Ce n'est pas une histoire de respect Crawley ! C'est ainsi et pas autrement !"

Et Alec soupira un instant avant de reprendre.

"- Ce n'est pas moi qui décide de qui ont doit fouiller je te rappel, voit ça avec tes supérieurs. Moi je ne fais que mon travail, celui pour lequel je suis fait.
Et du respect tu en as à partir du moment où c'est réciproque. En enfreignant les lois tu as perdu une partie du respect qui t'étais du, je n'y suis pour rien moi si ton épouse est aller voir un autre homme pour se faire engrosser et que depuis vous êtes sur la liste."

Il y allait un peu fort, utilisant des mots qu'en temps normal il pouvait regretter mais pas quand il travaillait. Il devait se montrer dur, digne de son rang et surtout de son travail. Un militaire qui pleurniche sur le sort des autres n'est pas digne de son rang. Alec aurait pu se montrer compatissant en d'autres circonstances mais là il n'avait pas le choix que de faire autrement.
Comme Alec le lui avait dit l'autre jour, c'est à lui d'être un peu plus ferme avec son épouse, s'il l'avait été cette dernière n'aurait pas fait de prison et ils ne seraient pas sur cette fichu liste qui fait d'eux des suspects potentiels.

Ronan ne comprenait pas, ou plutôt, ne voulait pas comprendre. Il ne risquait pas de prévenir son épouse, alors pourquoi ne pas le tenir au courant ? Il était certainement plus amusant de le voir angoisser à l'idée que son appartement soit fouillé, humilié d'être traité comme un ennemi alors qu'il avait toujours obéi aux ordres. Alors il protestait. Il réclamait de savoir et il réclamait du respect. Parce qu'il ne supportait plus d'être traité comme une chose, un traître, un Inférieur. Jamais auparavant il n'avait remis cette situation en cause, il l'acceptait parce que la vie sur l'Arche était ce qu'elle était. Ils avaient au moins eu la chance de survivre à la fin du monde. Aujourd'hui, il doutait du bien fondé de toutes ces inégalités et du traitement différent des habitants sur l'Arche.

Aussitôt après avoir parlé de respect, il se fit rappeler à l'ordre par le Supérieur. Bien sûr que c'était une histoire de respect ! Pourquoi aurait-on le droit de le parler ainsi si ce n'était pas une question de respect ? Pourquoi était-ce ainsi et pas autrement ? Il n'eut pas le temps de répondre, que le Supérieur soupira et reprit aussitôt. Ronan essayait de garder les yeux droit devant lui et de contrôler la poussée de haine, de colère qui montait en lui. Il serrait les poings pour essayer de se contrôler et contenir cette colère. Alec ne respectait rien. Il ne respectait ni Ronan, ni son épouse. Et Ronan ne supportait pas que l'on parle ainsi de sa famille, de sa femme. D'autant plus qu'elle n'avait, en réalité, rien fait. Tout le monde se permettait de juger sa famille, tout le monde se permettait d'y aller de son commentaire. Les mots qu'utilisait Alec étaient dégoûtants. Alec prenait-il réellement plaisir à rappeler ces faits ? A rappeler à Ronan qu'il n'était plus que l'homme trompé par sa femme ? Il lui avait déjà fait comprendre lors de la fouille qu'il aurait dû mieux savoir la garder, comme si Ronan devait contrôler son épouse. Il était à bout et ne se contrôlait plus. Sans réfléchir aux conséquences, il avait attrapé le bras d'Alec pour le stopper net dans sa marche et se tourner vers lui. La seule chose qu'il avait su retenir, c'est que ce poing fermé pour éviter qu'il ne finisse sa course sur le visage du Supérieur. S'il s'était battu, Ronan n'aurait pu échapper aux problèmes. « Je t'interdis de parler comme ça de ma femme ! » Il en oubliait le vouvoiement qu'il utilisait d'habitude avec le militaire. En l'espace d'une seconde, il venait de prendre tant de risques. S'adresser ainsi à un Supérieur était sa première erreur. Attaquer physiquement un Supérieur était sa deuxième erreur, répréhensible et condamnable même dans certains cas. Défendre sa femme alors qu'il était censé, aux yeux des autres, ne pas lui avoir pardonné était également une erreur pouvant le mettre en danger, lui et Emma, ainsi que leur mensonge. Il ne s'était sans doute passé qu'une fraction de seconde avant qu'il ne se rende compte de tout ça et qu'il lâche le bras du Supérieur, ne sachant plus ce qu'il devait faire, regrettant déjà son geste.

Alec comprenait la demande de Ronan sauf qu'il ne pouvait rien faire pour lui, ce n'était pas de son ressort. Il n'avait qu'à en discuter avec son supérieur hiérarchique, après tout il en avait un et c'était ce dernier qui avait ordonné la fouille chez lui. Alec n'y était pour rien, il avait juste assisté à cette fouille parce qu'il fallait qu'il y soit. Que ce soit chez Crawley ou ailleurs, pour lui c'était du pareil au même tant qu'il ne tombait pas chez un vrai résistant et qu'il n'y avait rien le compromettant lui, il s'en fichait.

"- On est tous logé à la même enseigne depuis quelques temps je te rappel."

Tout le monde pouvait être fouillé sur simple supposition. Une dénonciation et paf même les supérieurs pouvaient subir le même traitement que Ronan avait subit l'autre nuit. Plus l'arche avançait vers la nouvelle terre plus les habitants de cette dernière étaient surveillés et malmenés à croire que l'arrivée ne se ferait pas sans encombre.

Alec se montra quelque peu intolérant, il le fallait s'il voulait rester insoupçonnable mais comprenait en partie ce que le milicien pouvait ressentir. Il ne réagit pas vraiment quand Ronan s'agrippa à lui pour tenter de le frapper tout en se retenant.

"- Calmes toi Crawley ça pourrait mal se terminer pour toi."

Alec leva son bras pour poser sa main sur le poing de Ronan afin de le faire lâcher prise et surtout de lui montrer qu'il ne voulait pas se battre. De toute façon tout ceci finirait très mal pour tous les deux, surtout si c'était pendant le temps de service.

"- Si tu veux te battre on peut régler ça en salle d'entrainement en dehors des heures de service."

C'était une sorte d'appel à la vengeance pour Ronan s'il y tenait, s'il voulait vraiment se défouler c'était possible et personne ne leur dirait rien si l'un d'eux venait à frapper l'autre. Si ça pouvait calmer un peu le milicien, Alec pouvait faire ça pour lui.
Alec faisait toujours preuve d'un calme sans faille mais il n'aurait pas fallu qu'on s'en prenne à son épouse parce que là le personnage qu'il était deviendrait une toute autre personne. Il pouvait donc comprendre la réaction de Ronan vis à vis de ce qu'il venait de lui dire.

"- Allez, on a du boulot !"

Et il fit mine à Ronan d'avancer. Ils avaient encore quelques appartement à visiter, à mettre sans dessus dessous et peu être même quelques fausses preuves à dissimuler, allez savoir. Des têtes devaient tomber alors il fallait bien trouver quelque chose.

Logé à la même enseigne ? Il se fichait de lui ou quoi ? Ils n'étaient pas logés à la même enseigne ! Les Supérieurs étaient bien moins suspectés, toujours mieux traités, jusqu'à présent en tout cas. Bien sûr, ils pouvaient faire l'objet de fouilles eux-aussi, mais aux yeux de Ronan, ce n'était pas la même chose. Alors non, il ne supportait pas d'entendre un Supérieur parler d'égalité quand l'égalité n'existait plus du tout dans ce vaisseau.

La discussion continuait. Le Supérieur se montrait mauvais, vulgaire. Et même si avec Emma rien n'allait, Ronan ne pouvait pas laisser quelqu'un parler d'elle ainsi. Il en avait assez de voir sa famille humiliée et rabaissée. Alors sans réfléchir il avait attrapé le bras du Supérieur et était prêt à le frapper. Heureusement, par il ne savait quel miracle, il avait au moins réussi à retenir ce poing, à défaut d'avoir pu retenir ses mots et son geste. Il comprit néanmoins rapidement son erreur, il n'avait nullement besoin de la mise en garde d'Alec. Il baissa son poing sous la pression du Supérieur. Se battre était la pire des idées à avoir. « Je ne veux pas me battre... » Même si ça lui ferait sans doute du bien de se défouler un peu, d'évacuer toutes les tensions qui s'accumulaient en lui. « Je veux juste que vous respectiez ma famille ! » Cracha-t-il. Avec ça, il n'aurait sans doute pas eu ce genre de réaction. Etait-ce si compliqué à comprendre ?

Il s'éloigna du Supérieur, se remettant à ses côtés, à bonnes distances lorsqu'il ordonna de repartir travailler. Les appartements n'allaient pas se fouiller tout seul. « Un jour, on payera tous ce qu'on est en train de faire ! Alors profitez bien de détruire la vie des gens, le temps que vous le pouvez encore ! » Il n'était plus à une connerie près avec Alec, alors il ne se retenait pas de lui dire ce qu'il pensait. Ils payeraient tous. Autant lui que les autres, et il espérait sincèrement que les Supérieurs payeraient davantage pour tout le mal qu'ils faisaient. Il ne fallut pas longtemps aux miliciens et au militaire pour arriver devant le premier appartement à fouiller. Encore une fois, c'était reparti pour un tour.

Alec soupira, observant le milicien qui semblait totalement dépassé, comme s'il ne pouvait pas encaisser ce genre de propos sur son épouse et le mal qu'elle lui avait fait en le trompant. D'ailleurs, il avait du demander à son épouse le nom de cet homme afin d'aller faire un tour chez lui et tout foutre en l'air comme ils l'avaient fait chez Crawley. A sa place Alec aurait fait ça, juste pour le plaisir de lui faire du mal et lui montrer qu'il l'avait à l'oeil. C'était possible après tout Alec n'avait pas vérifié l'attitude de Crawley durant les autres fouilles ces derniers temps. Chose intéressante à suivre et Alec ferait plus attention à l'avenir.

"- D'accord, mais sache que si tu as besoin de te défouler tu pourras toujours passer à nos entrainements. Parfois cogner ça fait du bien."

Alec l'encourageait à laisser parler sa rage et à évacuer cette dernière sans prendre le risque de frapper un supérieur et de finir emprisonné, à lui d'en profiter ou pas.
Crawley avait un enfant, on pouvait donc comprendre qu'il considérait toujours avoir une famille même après ce que son épouse avait fait, mais Alec ne voyait pas les choses de cette façon. Si ça lui arrivait très certainement qu'il quitterait ses quartiers et essayerait d'oublier son épouse.

"- Très bien."

Qu'il lui répondit dans un long soupire, montrant bien qu'il ne le faisait pas par plaisir mais par respect. Il allait arrêter de parler de son épouse comme il le faisait et ne dirait plus rien, du moins il essayerait.

Ils se remirent en route et Ronan reprit la parole, chose qui étonna Alec, il semblait avoir des remords sur ce qu'il faisait depuis des mois, à croire que le fait d'avoir été victime de ses propres méthodes de travail l'avait profondément choqué.

"- On ne fait que notre travail, on obéit aux ordres tout comme toi et on n'a pas à avoir d'états d'âmes."

Du moins ça c'est devant les autres, mais une fois tout seul c'est différent, parfois Alec se laisse aller à la rage qu'il ressent pour ce qu'on lui demande de faire à ses compatriotes. Il a la chance de pouvoir se défouler en s'entrainant quand il le désire, sans avoir à se justifier. Sa colère et sa rage il la met dans ses entrainements qui parfois le vide de toutes ses forces.

Ronan n'en revenait pas. Le Supérieur se permettait d'abord de se montrer vulgaire en parlant d'Emma puis il proposait à Ronan de se défouler en se battant. Ronan n'aurait aucun besoin de se défouler si les Supérieurs respectaient sa famille. Comment pouvait-il se permettre de parler de l'épouse du milicien comme ça ? Il n'avait donc aucun respect ? Ronan était hors de lui, mais reprenait son calme après avoir risqué gros en attaquant le Supérieur. Heureusement, il était resté calme de son côté et n'avait pas menacé Ronan de le faire arrêter. « Ça marche sans doute pour les brutes, mais pas pour moi. » Il était persuadé que pour lui, ça ne marcherait pas, pourtant il savait bien qu'il avait besoin de se défouler et de laisser sortir toute sa rage. S'il était trop fier pour accepter l'aide du Supérieur, peut-être reviendrait-il en arrière lorsqu'il n'en pourrait plus de contenir tant de sentiments négatifs. Pour le moment, il réclamait juste un peu de respect, autant qu'il pouvait en espérer. Alec accepta, mais il ne semblait pas le faire par envie. Sans doute voulait-il empêcher qu'il n'y ait plus de tensions durant le travail. Après tout, il se fichait sans doute de Ronan et de sa famille.

De nouveau en route pour aller fouiller des appartements, Ronan ne put s'empêcher de l'ouvrir de nouveau. C'était l'une des premières fois où il ne réussissait pas à se contrôler et garder son calme. Sans doute était-il à bout cette fois. Il n'en pouvait plus d'obéir à de tels ordres, de détruire des vies. « Notre travail ? Lorsque je suis devenu milicien, ce n'était pas pour détruire des vies... » Au contraire. Mais Alec devait s'en ficher de ça aussi. Il était le parfait petit Supérieur qui obéissait sans poser de questions. Ils arrivèrent enfin dans un premier appartement, ils frappèrent et entrèrent presque aussitôt. Ronan gardait les yeux baissés, honteux de fouiller des voisins, des Inférieurs. Il attendait simplement les ordres, conscient qu'en présence d'autres citoyens de l'Arche il avait plutôt à intérêt à la fermer et à ne pas trop chercher les histoires.

Alec regardait Crawley et comprenait d'une certaine façon sa manière de réagir, juste qu'il ne pouvait pas se permettre de se montrer faible ou de faillir juste pour un homme blessé dans son fort intérieur. Ce travail n'était pas toujours évident mais dans le fond Alec ne savait pas que toute cette histoire avec son épouse était fausse, un mensonge raconté afin qu'elle garde la vie sauve, donc forcément difficile de se montrer compatissant avec cet homme. La réaction de Ronan fit naitre un petit sourire sur le visage d'Alec.

"- Je ne suis pas une brute pas plus que toi, mais au moins le défoulement me vide l'esprit et j'ai l'impression que tu en aurais bien besoin Crawley."

Alec avait toujours été franc et il ne prenait pas de gants même avec ce milicien qui pourtant n'était pas qu'un simple milicien puisqu'il était tout de même parmi les plus gradés du lot.
Il haussa les épaules à la seconde réflexion du milicien et répondit simplement.

"- On ne détruit pas de vie on fait juste respecter les lois de l'arche."

Il fallait visiblement lui rappeler ce qui faisait d'eux ce qu'ils étaient, des soldats au service de l'arche, faisant respecter les lois afin que chacun puisse espérer un jour profiter de la nouvelle terre. Sauf qu'Alec espérait bien profiter de sa liberté une fois sur la nouvelle terre et cesser de travailler pour ces brutes.

L'appartement qu'ils étaient venu fouillé était devant eux et ils entrèrent presque sans sommation, faisant leur job comme à leur habitude, sans prendre de gant, de manière brutale juste pour choquer les esprits et bien montrer qui ils étaient et ce qu'ils venaient faire là.

Ronan ne pouvait s'empêcher d'en vouloir à chaque être peuplant ce vaisseau. La situation dégénérait. Pas seulement pour lui, mais pour le reste de l'Humanité. Ils étaient en train de se détruire, oubliant sans doute qu'ils étaient tous les derniers représentants de la race humaine. Cet homme à ses côtés était, selon Ronan, l'exemple même de ce qui allait les détruire. Aucune compassion, aucun respect. Il faisait son boulot en détruisant les vies. Ce que Ronan faisait aussi. Lui il le faisait plus par obligation qu'autre chose, qu'en était-il d'Alec ? Il semblait tant n'avoir aucun remord qu'il était difficile pour Ronan d'imaginer qu'il le faisait sans plaisir. « Il n'y a qu'une brute pour penser que la seule solution pour se vider l'esprit est de se battre ! » rétorqua-t-il de nouveau, ne voulant assumer qu'il avait, en partie, raison. « mais si tu y tiens tant... » C'était une façon indirecte d'accepter après avoir tant refusé. Sans doute s'en prendrait-il une bonne parce qu'il ne faisait pas le poids face à Alec, mais il donnerait tout ce qu'il avait pour se défouler et espérer en ressortir mieux. Au reste Ronan ne répondit rien, l'excuse était si simple et utilisée par tous. Tous excusaient leurs actes les plus horribles par le respect des lois. Etait-ce vraiment une bonne raison ? Ronan en doutait parfois. Ronan poussa un long soupir, fouillant l'appartement comme à son habitude. Il jeta un coup d'oeil aux inquiets propriétaires, ressentant ce qu'ils ressentaient. Ils n'avaient rien à se reprocher et les miliciens ressortirent rapidement de l'appartement. « Pourquoi étaient-ils soupçonnés ? Juste parce que ce sont des Inférieurs ou il y avait une véritable raison derrière ? » Ils fouillaient beaucoup, sans avoir de résultat. Rares étaient les fois où les miliciens trouvaient quelque chose alors Ronan était curieux de connaître le pourquoi ils étaient fouillés, eux. Quelles raisons poussaient les autorités à les suspecter ? Rien n'avait été signalé à Ronan, il fallait dire que depuis peu, on lui confiait bien peu de choses, craignant sans doute qu'ils fassent partie de ses résistants après la fouille qui avait eu lieu chez lui. Il n'était plus bon qu'à fouiller et patrouiller.

Ces deux là ne s'entendraient jamais mais ce n'était pas grave, Alec n'était pas là pour se faire des amis et encore moins quand ces derniers étaient des pauvres mecs avec des états d'âmes bien trop sensible pour faire leur job correctement. Ronan avait changé, Alec ne l'avait pas connu ainsi, à croire que la faute d'un être aimé peut vous changer de manière radicale.

"- Si c'est ce que tu penses c'est ton problème."

Alec n'était pas une brute et il ne se battait que lorsqu'il n'avait pas d'autre choix, le reste c'était pour se défouler et toujours avec un adversaire qui faisait la même chose que lui.

"- Je suis à la salle d'entrainement tous les jours à 18 heures."

Donc à lui de voir s'il veut s'entrainer et se battre contre Alec ou bien contre un autre. Il savait, il n'avait plus qu'à décider.

La fouille commença et comme à leur habitude les soldats et les miliciens présents ne prenaient pas de gants et y allaient de leur mauvaise volonté, mettant l'appartement sans dessus dessous, ne faisant attention à rien d'autre qu'à ce qui pouvait s'apparenter à des preuves.

Et puis comme ils n'avaient rien trouvé, comme souvent d'ailleurs il quittèrent les lieux et Ronan posa une question à Alec, question à laquelle il avait bien une réponse mais ce n'était pas forcément celle attendu.

"- Ils commencent à psychoter en haut lieu, du coup tout le monde aura droit à sa fouille. Il ne faut pas te formaliser, j'y ai eu droit moi aussi."

Alec se permettait un petit jugement personnel, rien qui n'allait contre les lois de l'arche mais qui montrait bien l'état d'esprit des hautes instances. Ils en étaient arrivés là afin de faire voir au peuple qu'ils étaient à leur merci;

Ronan n'en peut plus de ce gars. Il n'est, pour lui, qu'une brute obéissante, sans scrupule. Obéir était une chose, une chose presqu'impossible à ne pas faire tant ils étaient surveillés. Mais devaient-ils le faire sans remord, sans regret et sans culpabilité ? Ronan en tout cas ressentait tout ça et c'était sans doute ce qui faisait de lui quelqu'un qui pouvait être encore sauvé, contrairement à Alec. C'était en tout cas sa façon de se rassurer, de voir qu'il y avait pire ailleurs. « Je viendrais. » lança-t-il finalement. Il ne savait pas quand, mais il viendrait. Il n'en pouvait plus de se laisser faire, de subir ce Supérieur.

Ils n'eurent pas le temps d'en dire plus que déjà ils étaient chez ces Inférieurs. Les nouvelles victimes de ce système sur l'Arche, comme tous les Inférieurs, ou presque. Ils fouillèrent alors l'appartement, et ne trouvèrent rien. Ronan n'y voyait plus rien d'étonnant depuis longtemps puisqu'à chaque fois, ou presque, ils ne trouvaient rien. Alors Ronan se permit une question à Alec. Et Ronan fut surpris par l'information. « Les Supérieurs aussi ? » Ronan n'avait eu à fouiller aucun Supérieur, il n'était même pas au courant. L'information était étonnante et incroyable. « Et pourquoi psychotent-ils autant ? La Résistance est-elle si importante et dangereuse ? » S'il pouvait obtenir des informations, il ne serait pas contre. Bien qu'il ne souhaitait en aucun cas rejoindre la Résistance, obtenir des informations pouvait se révéler important et intéressant pour la suite.